Intervenons-nous

À Bukavu et dans ses environs, dans la province du Sud-Kivu, le consentement au sein du couple reste un sujet délicat, souvent tabou. Entre respect mutuel et violations insidieuses, les témoignages de femmes révèlent une réalité complexe et parfois douloureuse. Le jeudi 28 novembre 2024, plusieurs d’entre elles ont confié leurs histoires à La Prunelle RDC, éclairant les défis quotidiens autour du consentement conjugal.

Quand le respect se construit dans l’harmonie

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Grâce, une mère d’un enfant, raconte son histoire avec une pointe de sérénité. Dans son foyer, tout est clair et bien organisé :

« Nous avons décidé d’avoir des rapports sexuels deux ou trois fois par semaine, et quand ce jour arrive, aucun de nous ne peut refuser », explique-t-elle calmement.

Ce modèle de consentement planifié n’est pas seulement une routine pour elle, mais une manière d’éviter les conflits et d’assurer la stabilité de leur couple. Elle est convaincue que cette approche prévient également l’infidélité.

Pour Nzigire Bashige, une habitante de l’avenue Irambo, le respect du consentement repose sur une autre dynamique, teintée de tendresse et de complicité.

« L’amour, pour moi, commence bien avant l’acte. Dans le salon, à travers un sourire, un geste doux ou même une danse », raconte-t-elle avec un sourire éclatant.

Pour elle, l’intimité est une alchimie. Ce respect mutuel leur a permis de redéfinir leur couple, lui donnant accès à un plaisir qu’elle n’avait jamais connu auparavant : « C’est grâce à cette approche que j’ai découvert le véritable orgasme ».

Quand le consentement devient un combat

Pour d’autres, comme Mapendo, le quotidien est marqué par la contrainte et la douleur.

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Récemment mariée et vivant à Cijo, dans le territoire de Kabare, elle subit des rapports imposés par son mari, même lorsqu’elle est malade.

« Parfois, il ne demande même pas mon avis. Je me sens forcée, et cela me fait mal, physiquement et émotionnellement », témoigne-t-elle, visiblement bouleversée.

Son mari, interrogé, avoue : « Je ne savais pas que cela pouvait être considéré comme une violence. Je pensais juste à mes besoins. » Aujourd’hui, conscient du mal qu’il cause, il promet de changer.

Une autre femme de Bagira, qui a souhaité garder l’anonymat, déplore la transformation de son mariage. « Au début, il me demandait toujours si j’étais d’accord. Maintenant, il m’impose ses désirs avec brutalité, sans tenir compte de mon état », raconte-t-elle avec amertume.

Elle se sent trahie par ce qu’elle considérait autrefois comme un amour sincère.

Le consentement : un pilier contre les violences conjugales

Ces récits mettent en lumière un problème de société préoccupant : l’absence de consentement mutuel dans de nombreux foyers, qui nourrit frustration, domination et violences conjugales.

Sans consentement, la relation intime devient un terrain fertile pour les abus. Ignorance des droits, pressions culturelles et inégalités dans le couple ne font qu’amplifier cette réalité. Pourtant, les témoignages de femmes comme Grâce et Nzigire prouvent qu’un autre modèle est possible, basé sur l’écoute et la communication.

Une période d’activisme pour briser le silence

Alors que les 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes battent leur plein, il est urgent d’intensifier les efforts pour sensibiliser les couples sur l’importance du consentement.

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Des campagnes éducatives doivent être menées pour montrer que le respect mutuel n’est pas une faveur, mais un droit. Les communautés, les chefs religieux, les associations et les institutions locales ont un rôle crucial à jouer pour transformer ces pratiques culturelles.

Chaque geste compte. Chaque témoignage, comme ceux partagés ici, est une pierre à l’édifice d’une société où les relations conjugales sont fondées sur l’amour, le respect et l’égalité. Les femmes de Bukavu et d’ailleurs méritent mieux. Elles méritent la dignité.

Séraphin Mapenzi

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