Intervenons-nous

Le juge président du tribunal de grande instance de Kinshasa Gombe décédé la nuit du 26 au 27 mai dernier avait deux rendez-vous avec deux cadres de la Présidence.

Selon le magazine Jeune Afrique, le juge s’est rendu à au moins deux rendez-vous avec des officiels. Le premier a eu lieu au Palais de la nation. Raphaël Yanyi a rencontré un membre du cabinet du président Félix Tshisekedi.

Le second rendez-vous l’a conduit dans un lieu que nous ne sommes pas pour l’instant parvenus à identifier. Le juge s’y est entretenu avec un autre cadre haut placé au sein de la présidence.

Était-ce avec François Beya, le conseiller en sécurité du chef de l’État ? L’information a été abondamment relayée sur les réseaux sociaux, mais selon un collaborateur de l’intéressé, elle est fausse. « C’est une intox, une de ces fake news distillées par des officines obscures qui veulent créer la confusion dans les hautes sphères de l’État. »

Le magazine poursuit en disant qu’après ce nouveau rendez-vous, Raphaël Yanyi est reparti à son bureau, au tribunal de Kinshasa-Gombe. C’est là que, si l’on en croit ce qu’a déclaré, Sylvano Kasongo, le chef de la police de Kinshasa, au lendemain du décès, le magistrat aurait été pris d’un premier malaise et aurait décidé de rentrer chez lui.

On sait qu’il a été admis au Centre hospitalier Nganda, à Kinshasa, vers 2 heures du matin dans la nuit du 26 au 27 mai. Contactée par Jeune Afrique, son épouse a refusé de détailler les heures qui ont précédé, expliquant craindre que ses déclarations puissent mettre en danger sa vie et celle de ses quatre enfants encore mineurs.

Alors que dans le rapport d’autopsie, le magistrat qui présidait les audiences du procès Kamerhe est décédé après avoir reçu un ou plusieurs coups à la tête, sa famille n’a pas cru en la version officielle.

Au lendemain de l’annonce du ministre de justice, la 17 juin, la famille du juge Yanyi a officiellement contesté les conclusions du rapport d’autopsie, affirmant via un communiqué que la procédure était « viciée ». « L’annonce des rapports d’autopsie [par le ministre de la Justice] revêt un caractère plus politique que judiciaire », a-t-elle ajouté, regrettant de n’avoir eu la primeur des conclusions des deux médecins légistes. La médiatisation du rapport « viole le secret de l’instruction », conclut-elle, avant de demander l’ouverture d’une enquête indépendante.

Cette affaire est donc pleine d’incohérence.

Tout ceci survient alors que dans les heures qui avaient suivi le décès, Miguel Bagaya, chargé des opérations de la police nationale, assurait que Raphaël Yanyi avait « succombé des suites d’une crise cardiaque » tandis que tout Kinshasa bruissait des rumeurs les plus folles.

Cette nouvelle version pose pourtant question. Ne serait-ce que parce qu’à l’autopsie, les deux médecins légistes (dont l’un a été mis à disposition par la Monusco) ont retrouvé des traces de « substances toxiques » dans l’organisme du défunt. Célestin Tunda Ya Kasende assure toutefois qu’elles étaient présentes « à dose non létale » et que l’empoisonnement n’est donc pas la cause du décès. Le juge, insiste-t-il, a succombé à des coups portés à la tête.
Sous protection constante

Mais si c’est le cas, quand et dans quelles circonstances le magistrat a-t-il été agressé ?  Raphaël Yanyi, 55 ans, était sous la protection constante « d’au moins six policiers » depuis le début du procès de l’ancien directeur de cabinet du chef de l’État, accusé de détournement de fonds. Difficile d’imaginer qu’il ait pu recevoir des coups si puissants qu’ils lui seront fatals dans les heures qui suivent sans que personne ne s’en aperçoive ni qu’il en fasse état à son entourage.

Share.
Leave A Reply

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.