Le 5 décembre 2024, une note circulaire adressée au ministre provincial des Médias et de la Communication a été rendue publique, appelant à améliorer la sécurité des journalistes et des activistes prodémocratie ainsi que des défenseurs des droits de l’Homme dans la province du Sud-Kivu. Ce plaidoyer, soutenu par plusieurs organisations dont AFEM, vise à dénoncer les attaques récurrentes et les entraves à la liberté de la presse dans cette région.
Les derniers mois ont été marqués par un nombre inquiétant de menaces, intimidations, arrestations et interpellations visant des journalistes et professionnels des médias dans le cadre de leur mission.
Ces actes, souvent commis par des autorités politiques, militaires et policières, contreviennent à leur obligation de protéger ces acteurs de la société civile, dont le rôle est essentiel dans la recherche, le traitement et la diffusion de l’information.
Selon le communiqué, l’accès aux sources d’information publiques demeure un problème majeur, limitant ainsi l’impact du travail des journalistes et activistes.
« La sécurité et la protection des professionnels des médias, des journalistes, activistes pro-démocratie et défenseurs des droits de l’Homme est un défi majeur qui entrave leur capacité à fournir une information complète et fiable », peut-on y lire.
Le texte fait également référence à la loi n°23/009 du 13 mars 2023, qui garantit l’accès à l’information pour les journalistes, mais qui reste trop souvent ignorée. Cette législation impose à tout détenteur d’informations de les livrer aux professionnels des médias sans entraves, facilitant ainsi l’accès à une information de qualité pour le public.
Dans le cadre du projet « Une presse libre, professionnelle, inclusive et plurielle pour l’accès à une information fiable au Nord et Sud Kivu », mis en œuvre par AFEM et financé par l’Ambassade d’Allemagne en RDC, plusieurs violations de la liberté de la presse ont été documentées.
Depuis janvier 2024, 32 cas d’atteintes à la liberté de la presse ont été signalés, dont 5 touchant des femmes. Ces incidents ont été recensés principalement dans les villes de Bukavu, Uvira (Sud-Kivu) et Goma (Nord-Kivu).
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À titre d’exemple, dans la zone d’Uvira, un journaliste de la Radio Rurale de Sange, Shukuru François, a échappé de justesse à une tentative d’assassinat par un homme armé.
D’autres journalistes ont été victimes de menaces de mort de la part de groupes armés opérant dans la région. Parmi eux, des reporters des médias Avertiom.net, Radio Lukula et Imara TV.
Le 2 novembre 2024, un autre incident a été rapporté : l’agression d’un défenseur des droits humains, Prince Centwali, Vice-Président de la Société civile de Bagira. Par ailleurs, un journaliste de Le Potentiel, Isaka Kijana, est actuellement en détention à Bukavu, sans raison légale justifiée.
Malgré les lois existantes pour protéger la presse, la sécurité des journalistes et défenseurs des droits humains au Sud-Kivu reste un défi majeur. Il est rappelé que la province a pris des mesures positives, en votant et en promulguant un édit pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme et des journalistes. Cependant, la mise en œuvre de ces lois reste insuffisante.
Les organisations signataires de la note, AFEM, RATECO et UNPC, demandent au gouvernement provincial d’agir concrètement pour la protection des journalistes et des défenseurs des droits humains.
Elles appellent à l’application effective de l’édit provincial qui protège les journalistes et à l’organisation d’audiences foraines pour punir les auteurs d’atteintes à la liberté de la presse et aux droits de l’Homme, afin de garantir un environnement sûr pour les professionnels des médias.
Les recommandations incluent également la réalisation d’un suivi rigoureux des cas de violations des droits des journalistes et de renforcer la formation des autorités locales sur les enjeux de la liberté de la presse et des droits humains.
Enfin AFEM et ses partenaires saluent les efforts du ministre des Médias et des autorités compétentes pour améliorer la sécurité des journalistes, tout en insistant sur l’importance de mettre en œuvre les textes de lois et d’assurer la protection effective des acteurs sociaux dans cette région.
Édith Kazamwali