Dans une lettre ouverte adressée, le 1er novembre 2023, à M. Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, Président de la République, l’Observatoire de la Liberté de la Presse en Afrique (OLPA) craint une campagne électorale « incendiaire » et violente dans les médias congolais. Ceci à cause d’une faible couverture de régulation des médias à travers le pays. OLPA appelle le président Tshisekedi à s’impliquer hic et nunc pour éviter le pire d’ici deux semaines.
« Nous pouvons affirmer sans risque de nous contredire que la campagne électorale dans les médias sera violente et incendiaire. Les congolais seront débordés par la désinformation, l’apologie de la haine tribale et ethnique, le discours incendiaire faute de la régulation complète des médias dans plus au moins 145 territoires de la République démocratique du Congo », c’est par cette phrase que l’organisation OLPA alerte la première institution alors que le pays se dirige vers des élections générales en décembre 2023.
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En RDC, la campagne électorale début avant le 19 novembre prochain mais cette organisation de défense de la liberté de la presse demande au Président de la République de bien « vouloir prendre la mesure de la situation avant qu’il ne soit trop tard ».
Absence de régulation
Le pays compte actuellement plusieurs centaines de stations de radiodiffusion sonore dans les 145 territoires, alors que la télévision, la presse écrite et en ligne sont concentrées dans quelques grandes villes du Congo. Et pour OLPA, la régulation est quasi-inexistante.
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« Tout observateur averti du paysage médiatique peut soutenir avec nous que la régulation des médias en RDC est quasi-inexistante depuis votre avènement à la tête du pays en 2019. Seuls les organes de presse de la ville de Kinshasa qui abrite le siège du Conseil supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC), sont à peine régulés alors que la multitude des médias de 145 territoires, principalement les radios, ne connaissent la régulation que du bout des lèvres ».
En effet, la loi électorale en ses articles 33 et suivants, tout comme la loi organique portant composition, attribution et fonctionnement du Conseil supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC) reconnaissent que l’instance publique de régulation des médias veille au respect du principe d’égalité de production entre les candidats en ce qui concerne la diffusion dans les médias publics de leurs activités, écrits, déclarations ainsi que la présentation de leur personne.
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Le CSAC intervient le cas échéant, auprès des autorités compétentes pour que soient prises toutes les mesures susceptibles d’assurer cette égalité. Les conditions d’accès aux médias publics aux fins de la campagne électorale sont arrêtées par le CSAC en concertation avec la CENI. Elles sont publiées un mois avant le début de la campagne électorale.
« Malgré cette bonne foi du législateur, la triste réalité sur terrain suscite bien des doutes sur la mise en application effective des dispositions ci-haut évoquées », regrette OLPA.
L’organisation est formelle : les espoirs suscités, en novembre 2022, par la nomination et l’investiture des membres de l’Assemblée plénière de CSAC ont laissé place à l’incertitude.
Le pauvre CSAC !
« La régulation des médias est plus que jamais une affaire kinoise. Seule la ville de Kinshasa dispose d’une administration de régulation des médias alors que la situation de la majorité des territoires est déplorable ».
Dans son monitoring, OLPA constate que les 11 coordinations provinciales du Conseil Supérieur de l’Audio-visuel et de la Communication (CSAC) autrefois opérationnelles font figure des parents pauvres.
«A titre d’illustration, les représentations de cette instance en provinces sont réduites à des bureaux de mallette, déguerpies et recherchées par les propriétaires d’immeubles pour insolvabilité après avoir accumulé plusieurs mois d’arriérés de loyer. Le matériel de monitoring vieux de plus d’une décennie n’attendent plus que leur transfèrement vers le musée. Avec des salaires de misère, le personnel démotivé, a l’esprit ailleurs ».
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Pour l’instant, se plaint OLPA, le Coordonnateur provincial de CSAC touche 210.000 francs congolais par mois, à peine 82 dollars américains, alors que le Secrétaire d’instruction se contente de 180.000 francs congolais ($ 70) et le Huissier 120.000 Francs congolais ($ 46). Un barème applicable depuis 2012, ne prenant pas en compte le coût de la vie.
« Les frais de fonctionnement d’un million des francs congolais ne peuvent couvrir les différents besoins. Seul le personnel de CSAC /Kinshasa a vu sa situation salariale légèrement améliorée », rapporte l’organisation.
En octobre 2022, le gouvernement a donné son quitus à l’équipe sortante de CSAC pour lancer un appel à candidatures en vue de recruter le personnel de cette institution pour les provinces démembrées, afin que le pays puisse être doté de 26 coordinations provinciales.
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Le processus de recrutement a été couronné par des tests mais le personnel retenu n’a jamais été à l’œuvre jusqu’à ce jour faute d’enveloppe budgétaire additionnelle.
« Leur prise en charge a été renvoyée à janvier 2024 alors que la campagne électorale et le scrutin sont prévus en novembre et décembre 2023 », rappelle l’Observatoire de la Liberté de la Presse en Afrique.
En définitive, rappelle OLPA, la régulation des médias dans les provinces sera absente et rien n’augure des lendemains meilleurs pour une campagne électorale apaisée dans les médias majoritairement contrôlés par des opérateurs politiques.
Aux grands maux des grands remèdes!
« Il est illusoire de croire que les récentes rencontres sur la rédaction d’un Code de bonne conduite des journalistes en période électorale et les mesures de gestion de la campagne électorale, ou encore les séances de vulgarisation de la directive actualisée sur la campagne électorale par les hauts conseillers du CSAC à travers quelques villes du pays, constituent une panacée au mal qui est si profond, mais s’avèrent comme l’expression du désespoir face à la quasi absence de régulation. Il en est aussi du probable déploiement des commissions de vigilance électorale dans les provinces à la veille du scrutin qui risque de dissiper des ressources utiles au renforcement des capacités opérationnelles des coordinations provinciales », tranche OLPA.
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Pour éviter une campagne électorale « incendiaire et violente » à travers les médias, OLPA recommande :
- d’ordonner, en toute urgence, la mise à la disposition du bureau de CSAC des moyens conséquents pour renforcer les capacités d’anciennes et nouvelles coordinations provinciales en terme de logistique, du matériel informatique, de monitoring en prévision des élections de décembre 2023;
- d’améliorer les conditions de travail du personnel du CSAC ;
- de décourager tout empiètement des attributions de CSAC par les autorités politico-administratives;
- de renforcer les capacités managériales des gestionnaires actuels de l’instance publique de régulation de médias.