Intervenons-nous

Une coalition de milices soutenues par l’armée congolaise, connue sous le nom de Wazalendo, est accusée de commettre de graves exactions contre les civils dans la province du Sud-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), a alerté Human Rights Watch (HRW) ce 23 mai. L’organisation de défense des droits humains appelle le gouvernement congolais à cesser tout soutien à cette coalition armée, à désarmer ses membres, et à traduire en justice les auteurs de crimes.

Depuis le début de l’année 2025, les milices Wazalendo – soutenues militairement par Kinshasa dans le cadre de sa lutte contre le groupe armé M23 – sont impliquées dans des actes de violence contre les populations civiles, y compris des meurtres, des extorsions, des passages à tabac, et des attaques ciblées à caractère ethnique, selon le rapport de HRW. Le soutien de l’État à ces groupes pose la question de la responsabilité du commandement militaire et politique dans les violations commises.

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« L’armée congolaise risque de se rendre complice d’exactions en soutenant les milices Wazalendo », a déclaré Clémentine de Montjoye, chercheuse senior à HRW.

Une milice « patriote » devenue bourreau des civils

Formée à la suite de la résurgence du M23 fin 2021, la coalition Wazalendo regroupe une vingtaine de groupes armés communautaires, dont certains étaient autrefois rivaux. Officiellement perçue comme une force patriotique, la milice a pris le contrôle de nombreuses localités dans le Sud-Kivu après le repli des forces armées congolaises face à l’avancée du M23.

Selon HRW, les combattants Wazalendo ont instauré des barrages routiers illégaux, perçu des taxes arbitraires, et infligé des châtiments corporels à des civils, parfois accusés de délits mineurs. À Uvira, un homme de 48 ans est mort après avoir été fouetté par un commandant Wazalendo pour un prétendu vol de télévision.

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Des violences ciblées contre les Banyamulenge

Le rapport dénonce également les attaques ciblées contre les membres de la communauté banyamulenge, des Tutsis congolais accusés par certaines factions d’être alliés du M23. À Bibokoboko, dans le territoire de Fizi, sept personnes ont été tuées lors d’une attaque de villages banyamulenge, et plusieurs maisons, écoles et centres de santé incendiés.

« Ils ont dit qu’ils étaient venus à Bibokoboko pour ‘nettoyer’ les Banyamulenge », a témoigné un chef de communauté local.

Dans certains cas, les miliciens Wazalendo auraient même attaqué ou désarmé des soldats de l’armée régulière, révélant un manque flagrant de contrôle hiérarchique. Des responsables militaires et civils, dont le député national Justin Bitakwira, sont soupçonnés de jouer un rôle dans le soutien logistique et financier à la milice.

Face à la montée des violences, HRW exhorte les autorités congolaises à réformer le secteur de la sécurité, à instaurer un mécanisme de contrôle sur l’armée et les groupes armés alliés, et à renforcer la lutte contre l’impunité. L’organisation plaide également pour la création d’un mécanisme judiciaire international afin de compléter les efforts nationaux en matière de justice.

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La situation sécuritaire s’est fortement détériorée depuis le retrait de la mission de maintien de la paix des Nations Unies (MONUSCO) du Sud-Kivu en juin 2024, laissant un vide sécuritaire comblé par les milices locales.

« Soutenir la coalition Wazalendo a des conséquences mortelles », conclut Clémentine de Montjoye. « Veiller à ce que les auteurs de crimes graves soient traduits en justice est un élément essentiel pour mettre fin aux années d’exactions dans l’est du pays. »

Vinciane Ntabala

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