Au lendemain de la signature d’un accord de principes entre le Gouvernement de la RDC et le mouvement M23 à Doha, au Qatar, le Ministre de la Communication et des Médias, Patrick Muyaya, a tenu à clarifier les contours de ce texte politique lors d’un point de presse conjoint avec le Ministre de l’Intérieur, Jacquemain Shabani, ce dimanche 20 juillet 2025 à Kinshasa.
Il s’agit, selon lui, d’un cadre politique et humanitaire de référence, qui jette les bases d’un futur accord de paix à négocier, et non d’un cessez-le-feu ou d’un règlement définitif du conflit.
« Il ne faut pas qu’on se perde », a déclaré Patrick Muyaya. « Il ne faut pas que les uns et les autres pensent que la justice sera sacrifiée au profit de la paix, non, surtout qu’ici nous avons eu des cas graves. »
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Le Ministre insiste : le document signé à Doha n’est ni un blanc-seing pour le M23, ni une renonciation à la justice. Il s’agit d’un accord de principes, un engagement préliminaire, qui doit ouvrir la voie à des discussions plus substantielles, notamment sur le désarmement, la justice transitionnelle, et le retour des déplacés.
Le ministre a été catégorique : la quête de paix ne signifie pas l’oubli des crimes. « Le processus judiciaire au niveau de la Commission des droits de l’homme, la Cour pénale internationale… ce qui a été engagé a été engagé parce que nous ne voulons plus qu’il y ait des victimes. »
Autrement dit, l’ouverture d’un dialogue politique ne bloque ni les enquêtes en cours, ni la responsabilité pénale des auteurs de crimes graves. Le gouvernement veut construire une paix durable sans compromettre les droits des victimes.
« Cet accord a été signé pour qu’il n’y ait plus de victimes, parce qu’il y en a déjà assez », a martelé Patrick Muyaya, rappelant que les motivations premières du gouvernement sont humanitaires et sécuritaires.
Il a notamment évoqué les milliers de personnes déplacées, dont le sort reste au cœur des préoccupations de l’État congolais. « Dans cet accord, il y a des paragraphes réservés aux personnes déplacées, pour qu’elles retournent à leurs lieux d’origine. Il faut que la guerre cesse, que les personnes touchées aient accès à l’appui humanitaire, que les bruits de bottes cessent afin qu’elles retournent chez elles – au Rwanda comme en RDC. »
Le Ministre Muyaya a reconnu que les défis sont immenses. « Cette convenance ouvre la voie à ce qui est pour nous plus difficile, car c’est une paix qu’il faut reconstruire avec des cicatrices, des victimes, des personnes qui ont été touchées. »
Il parle d’une paix exigeante, à rebâtir dans un contexte social, communautaire et politique profondément marqué par les traumatismes. Il appelle à la résilience, à la réconciliation, mais aussi à la responsabilité collective.
Appelant à une mobilisation collective, Patrick Muyaya a exhorté la population à accompagner ce pas politique :
« Il est important que, dans la suite de la volonté exprimée par le Président de la République, nous tous restions mobilisés pour donner une chance à ce qui s’est fait hier, comme une couverture d’une nouvelle période. »
Il appelle également les États voisins, en particulier le Rwanda, à respecter leurs engagements, dans un esprit de bonne foi et de cohabitation pacifique régionale.
Patrick Muyaya salue le soutien de la communauté internationale, notamment le rôle du Président américain, qu’il qualifie de garant moral du processus.
« Le président américain s’est réjoui et aujourd’hui, il peut être candidat au prix Nobel de la paix, car c’est le conflit le plus violent de l’histoire de l’humanité, mais qui n’a bénéficié que de peu d’attention au regard du nombre de victimes. »
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Le ministre a également annoncé une avancée majeure sur le front de la justice internationale. Une délégation de la mission d’établissement des faits du Conseil des droits de l’homme de l’ONU est présente à Kinshasa.
« Il y a une résolution qui a été adoptée à l’unanimité, qui pourra aboutir, d’ici septembre, à la création d’une commission internationale d’enquête. Il n’y a jamais eu une telle commission pour les crimes commis dans l’Est de la RDC depuis près de 30 ans. »
Enfin, Patrick Muyaya a salué la mobilisation populaire, tout en invitant à rester lucides face au scepticisme et aux manipulations. Il a également relayé l’appel du Ministre Julien Paluku à soutenir ce tournant historique.