Intervenons-nous

Luc Henkibrant, professeur de droit à l’Université Catholique de Bukavu et membre de l’Observatoire de la Parité en République Démocratique du Congo, qualifie de « catastrophique » la participation des femmes dans les instances de prise de décision en RDC, et plus particulièrement dans la province du Sud-Kivu.

Il a exprimé cette opinion ce mardi 5 novembre 2024, dans une interview exclusive accordéeC

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Selon lui, depuis l’adoption de cette résolution en 2000 et la promulgation de la Constitution, avec son article 14 sur la parité homme-femme, le pays en général et la province du Sud-Kivu en particulier demeurent dans un statu quo, voire connaissent une régression sur certains aspects.

« Entre les élections de 2006, 2011, 2018 et 2023, il est impossible de constater une augmentation significative de la participation politique des femmes. Les dernières élections ont confirmé cela. Par exemple, si l’on prend la province du Sud-Kivu, le rapport sur la parité homme-femme montre qu’au niveau de la députation nationale, il n’y a pratiquement pas eu de progrès. Au niveau provincial, les femmes restent faiblement représentées. Au niveau communal, lors des premières élections dans les communes, uniques dans les chefs-lieux de province, comme ici à Bukavu, nous avons élu 9 personnes par commune, soit 27 au total, et parmi elles, seules 2 sont des femmes. Il est nécessaire de se poser des questions sur les raisons de cet échec électoral », déclare le professeur Luc.

Il considère ce statu quo, voire cette régression, comme une véritable catastrophe dans la mise en œuvre de la Résolution 1325, 24 ans après son adoption.

Ce professeur et militant pour l’égalité des genres à Bukavu préconise la mise en place de mesures spéciales temporaires, ou de mesures de discrimination positive.

« En termes plus simples, il faut adopter des mesures contraignantes, telles que des quotas pour les femmes dans les institutions. Cette stratégie, que nous prônons depuis 2006, a malheureusement été abandonnée par la plupart des organisations de défense des droits des femmes, au profit d’une approche que nous qualifions de perdante, centrée sur le plaidoyer ou la sensibilisation à travers des ateliers et des rencontres avec les autorités, devant lesquelles on s’agenouille pour les supplier de nommer des femmes au gouvernement », déplore-t-il.

Pour lui, il est temps de changer de stratégie et de mettre en œuvre des actions concrètes pour rendre effective cette résolution, qui vise à assurer la participation des femmes aux processus de paix et dans la politique.

Selon lui, il est nécessaire de revenir à la stratégie gagnante des quotas, qui a été adoptée dans presque tous les pays voisins de la RDC, où le nombre de femmes dans les instances de décision a dépassé les 30 %, et dans certains cas, les 50 %.

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Luc Henkibrant s’interroge sur les raisons pour lesquelles cette stratégie n’est pas appliquée en RDC, soulignant que ce n’est pas une stratégie de plaidoyer, mais bien une stratégie de pression, visant à atteindre les objectifs de la Résolution 1325.

Il convient de rappeler que la Résolution 1325, adoptée le 31 octobre 2000, constitue un cadre essentiel pour renforcer la participation des femmes au processus de paix et à la gouvernance. Elle repose sur quatre piliers : la prévention, la participation, la protection, ainsi que les services de secours et de réparation.

Claudine Kitumaini

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