Le 6 avril, les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) ont lancé une nouvelle offensive pour reconquérir les positions occupées par les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Depuis quelques mois, le groupe armé s’est réorganisé.
Il a commencé par des attaques visant les gardes parcs de Virunga et les positions isolées des FARDC avant d’engager des affrontements plus conséquents qui l’ont emmené de sa base du mont Sabyinyo jusqu’à conquérir plusieurs villages sur la route Bunagana-Rutshuru.
Après avoir essuyé un revers au poste frontalier de Bunagana par l’armée ougandaise, le M23 a décrété un cessez-le-feu unilatéral le 1er avril 2022 et a demandé des négociations. Mais que va faire Kinshasa ?
Po na GEC, Bulletin du Groupe d’étude sur le Congo
Fraîchement nommé, le général Peter Chirimwami a repris le commandement des opérations [Sukola 2] des FARDC avec comme mission immédiate : faire face à la menace que fait peser le M23 sur la partie sud-est de la province du Nord-Kivu depuis quelques semaines.
Au même moment, un sommet est annoncé à Nairobi avec au programme la question du M23, entre autres. Il est prévu que les présidents ougandais, kényan et congolais y prennent part. Il n’est pas encore clair s’il y aura des pourparlers directs avec le M23. Toutefois, nos sources indiquent que ses représentants seront à Nairobi avec un cahier des charges.
Historiquement, le M23 peut être considéré comme héritier des rébellions du Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) et du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) dont il a récupéré la plupart des revendications, notamment le retour des réfugiés se trouvant en Ouganda et au Rwanda, l’intégration des combattants dans l’armée et la reconnaissance de leurs grades.
En RDC, l’intégration des combattants des groupes armés au sein des FARDC et la reconnaissance des grades est un schéma classique de tous les processus de paix depuis l’accord global et inclusif de Sun City auquel a participé le RCD.
En 2008, à l’issue du dialogue de paix de Goma, le CNDP, auquel le M23 a succédé, avait aussi obtenu de l’ancien président Joseph Kabila l’intégration dans l’armée avec reconnaissance de grades.
À ceux qui étaient critiques au sujet de l’intégration des rebelles dans l’armée, Kabila avait répondu que pour lui, « le choix est clair : la paix et la sécurité du Nord-Kivu passent avant toute chose ».
Manifestement, c’est la justice qui avait été sacrifiée au nom de la paix. Pourtant, ce choix politique n’avait pas empêché que soit créé le M23 par les mêmes militaires qui ont décidé de quitter l’armée quatre ans après leur réintégration.
En 2013 et en 2019, la RDC avait encore promis de réintégrer ces combattants. D’ailleurs, le M23 reproche au gouvernement de n’avoir pas, notamment, tenu cet engagement. Le groupe armé affirme que sa délégation a passé plusieurs mois à Kinshasa en attente de cette mise en œuvre sans aucun résultat.
Aujourd’hui, le nouveau programme de démobilisation, désarmement, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS), a décidé de mettre fin à l’intégration collective des combattants issus des groupes armés dans les FARDC. Les accords précédents prévoyant cette intégration sont devenus ainsi caduques car contraires aux principes du nouveau programme.
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Politiquement, l’intégration des rebelles dans l’armée reste impopulaire dans l’opinion congolaise. La Société Civile du Nord-Kivu s’y est d’ailleurs déjà opposée dans un communiqué rendu public le 4 avril 2022. Dans le contexte politique actuel, le gouvernement congolais peut accepter le retour des membres du M23 mais il lui sera difficile d’intégrer les combattants dans l’armée. Considérant le poids politique des électeurs de l’Est du pays, le président Félix Tshisekedi y perdrait beaucoup à près d’un an de l’élection présidentielle s’il accédait à cette revendication du M23.
Une question demeure : à défaut de leur offrir l’intégration, le Gouvernement sera-t-il capable de les contraindre à déposer les armes ?
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