Intervenons-nous

Huit négociateurs de Félix Tshisekedi, missionnés en Ituri, ont été capturés par le groupe armé Codeco. Parmi eux, deux anciens chefs rebelles: Thomas Lubanga et Germain Katanga, qui ont eu maille à partir avec la CPI. Les miliciens ont fait part de leurs revendications, notamment la fin de l’état de siège.

C’est une prise d’otage pour le moins étonnante : depuis le 16 février, huit négociateurs missionnés par Félix Tshisekedi pour arranger un cessez-le-feu avec des groupes armés ont été faits prisonniers, dans la province de l’Ituri. Parmi eux, ces deux hommes connus pour avoir semé la désolation dans l’est de la RDC, au début des années 2000, et condamnés par la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et complicité de crimes de guerre.

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Thomas Lubanga et Germain Katanga ont depuis purgé leur peine et jouent désormais les « pacificateurs » pour le chef de l’État congolais. Ils séjournaient depuis plusieurs semaines en Ituri, en espérant obtenir le désarmement et la reddition des combattants de la Coopérative pour le développement du Congo (Codeco), une milice accusée d’exactions par les Nations unies.

Une mission similaire – à laquelle Thomas Lubanga n’avait pas participé – avait déjà été organisée il y a un an. À l’époque, près de 1 500 combattants avaient accepté de quitter le maquis. Mais faute d’un accompagnement suffisant, nombre d’entre eux étaient ensuite retournés en brousse et avaient repris les armes.

Fief bombardé

Le 16 février dernier, les négociateurs de Félix Tshisekedi étaient donc de retour en Ituri et rencontraient des chefs de faction quand les événements ont pris un tour inattendu. « Ils étaient en plein pourparlers au camp Yalala, situé à deux kilomètres du village de Bambu, quand les chefs de milice ont été informés que leur fief était bombardé. Ils ont tout de suite mis fin aux discussions et arrêté les négociateurs du président », explique le porte-parole de la délégation, Pitchout Iribi Mbodina.

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Selon un document confidentiel consulté par Jeune Afrique, l’état de santé des otages est « généralement bon », même si trois d’entre eux, dont Thomas Lubanga, sont malades et n’ont pas reçu de traitement.

Sitôt la nouvelle de leur capture parvenue à Kinshasa, des négociations ont été entamées. Elles sont menées par Pitchout Iribi Mbodina. Dans le document dont nous avons eu connaissance, les miliciens détaillent leurs exigences.

Ils réclament notamment une amnistie pour leurs combattants et leur intégration dans les rangs de l’armée régulière – des revendications dont ils avaient déjà fait part, il y a plusieurs mois, à Félix Tshisekedi.

Mais aujourd’hui, la liste des revendications s’est allongée. La Codeco exige désormais la fin de l’état de siège (mesure instaurée en mai dernier pour ramener la paix dans l’Est), la libération de certains prisonniers, le retour des habitants dans plusieurs localités (dont celles de Bambu, Kobu et Lipri) et un arrêt des opérations militaires.

Situation délicate entre groupes ethniques

« Des revendications qui ne tiennent pas », balaye un ministre, selon lequel les autorités sont déterminées à « poursuivre les efforts pour obtenir la libération des otages ». « Il ne faut pas que le gouvernement tente une opération de force », réagit pour sa part un membre de la famille d’un otage, craignant que les miliciens puissent exécuter leurs prisonniers.

La situation est d’autant plus délicate que la Codeco est une milice à dominante ethnique lendu, alors que Thomas Lubanga est héma. Or les deux communautés s’affrontent depuis des années. Après une période d’accalmie, les violences ont repris fin 2017, de manière sporadique tout d’abord puis avec davantage d’intensité. « Si quoi que ce soit arrivait à Thomas Lubanga, les conséquences seraient incalculables, prévient un proche du chef de l’État. Ils [les Lendus] chercheraient à se venger et ce serait très grave. »

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Or sur le terrain, l’État ne contrôle pas grand-chose. La Codeco, elle-même, continue à se rendre coupable d’exactions en dépit de l’état de siège et des opérations menées conjointement par les armées congolaises et ougandaises.

En parallèle, le secrétaire général adjoint de l’ONU chargé du maintien de la paix, Jean-Pierre Lacroix, est arrivé ce mardi 22 février à Bunia, chef-lieu de l’Ituri. Il a remplacé au pied levé le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, qui a dû annuler sa venue en RDC en raison de la crise en Ukraine, a annoncé son porte-parole.

Avec Jeune Afrique

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