Devant le Parlement européen, le Prix Nobel de la paix 2018, Dr Denis Mukwege, a dressé un tableau alarmant de la situation sécuritaire et humanitaire qui sévit dans l’Est de la République démocratique du Congo depuis plus de trois décennies.
Au cours d’une conférence de presse tenue à Bruxelles, le célèbre gynécologue congolais a dénoncé l’indifférence de la communauté internationale face à un conflit qu’il qualifie de « plus meurtrier depuis la Seconde Guerre mondiale ». Selon lui, plus de six millions de morts ont été enregistrés, dans l’impunité la plus totale.
« Vingt-six millions de Congolais vivent dans une insécurité humanitaire accrue, et plus de 1,6 million d’enfants n’ont plus accès à l’éducation », a-t-il déclaré avec gravité.
Une guerre oubliée et meurtrière
Mukwege a fustigé le silence des grandes puissances face à la crise persistante dans la région, aggravée par la résurgence de la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23/AFC). Il a évoqué les conséquences dramatiques de cette instabilité : dix millions de personnes vivant dans la peur, privées d’accès à leur argent, aux soins de santé et à la nourriture.
« Les zones minières sont désormais sous contrôle des groupes armés. Leur expansion s’accentue, rendant la situation encore plus explosive », a-t-il prévenu.
Un drame humanitaire
Sur le plan humanitaire, le médecin directeur de l’hôpital de Panzi a déploré que 7,8 millions de Congolais soient déplacés internes, sans abri, ni sécurité. Certaines familles, a-t-il témoigné, n’ont jamais pu rester plus de six mois au même endroit ces dernières années.
En matière d’éducation, 1,6 million d’enfants ont été déscolarisés, en raison de la destruction d’écoles et de la persistance de l’insécurité.
Violations massives des droits humains
Mukwege a aussi dénoncé la recrudescence des exactions, notamment à Goma et Bukavu, deux villes stratégiques sous occupation partielle de groupes rebelles. Selon lui, plus de 600 cas d’exécutions sommaires ont été enregistrés rien que pendant le premier trimestre de 2025.
Mais le constat le plus glaçant reste celui des violences sexuelles, utilisées comme arme de guerre :
« En 2023, 123 000 cas de viols ont été recensés par les Nations unies. Cela représente une femme violée toutes les quatre minutes », a martelé le lauréat du Nobel.
Un appel à la justice
Face à cette situation « dramatique », Denis Mukwege a renouvelé son appel en faveur de la création d’un tribunal pénal international pour la RDC. Une instance qui, selon lui, permettrait enfin de juger les auteurs de ces atrocités et de rétablir les victimes dans leurs droits.
« Ce que vit l’Est de la RDC ne peut plus rester un conflit oublié. Il est temps d’agir. »