Le Gouverneur Jean-Jacques Purusi est sous pression. En cause : une grogne dans plusieurs secteurs de la vie de la province. Nominations contestées, accusations de non-respect des engagements politiques, la question de l’exploitation illicite des minerais…les sujets de pression sont légion dans une province qui tarde à amorcer son processus de développement.
Opérations de traque des exploitants illégaux de minerais !
D’abord, c’est la question de l’exploitation illicite des minerais qui met la pression sur le professeur Gouverneur du Sud-Kivu. Depuis quelques semaines, ce cadre de l’AFDC-A s’est illustré dans les opérations de traque des ressortissants chinois impliqués dans diverses activités illégales à Walungu et Mwenga. Au moins 14 ressortissants chinois ont été interpellés, avec environ 10 lingots d’or et 400.000 dollars américains saisis.
Mais ces opérations ne sont pas du goût de tout le monde. L’exploitation illégale des minerais est une question de « gros poissons ». Sénateurs, députés, puissants opérateurs économiques, ministres et autres mandataires publics voient en Purusi un frein à leur business florissant. Aussi, la procédure ayant conduit à ces résultats est vivement contestée par des acteurs clés du secteur minier, qui accusent Jean-Jacques Purusi de travailler en solo, en écartant les services publics concernés.
Par ailleurs, la communication du Gouverneur autour des derniers événements pose problème. L’affaire autour des lingots d’or saisis des mains des ressortissants chinois a notamment suscité des interrogations. Alors que la communication faite peu après 22 heures lors de leur arrestation affirmait que les Chinois détenaient 12 lingots d’or et 800.000 dollars, le Gouverneur Purusi a dû revenir sur ses déclarations, expliquant qu’il s’agissait en réalité de 10 lingots d’or et 400.000 dollars américains.
Selon lui, l’argent n’avait pas été compté précisément lors de la saisie, et une estimation hâtive avait mené à des confusions. Il a précisé que les 400.000 dollars, répartis en huit colis, avaient été mal évalués initialement. Concernant les lingots d’or, il a révélé que certains contenaient des substances mélangées, nécessitant l’usage d’un détecteur pour en vérifier la composition.
« L’erreur provenait du fait que nous n’avions pas compté précisément. Beaucoup pensaient que chaque colis contenait 100.000 dollars, mais lors de la rédaction du procès-verbal avec les Chinois, ils nous ont indiqué qu’il s’agissait de 50.000 dollars par colis, pour un total de huit colis. Concernant les lingots d’or, nous avons découvert, en les ouvrant avec les Chinois, qu’ils contenaient des substances mélangées, ressemblant à du chanvre, et qu’ils étaient soudés dans le véhicule. Pour les détecter, nous avons dû utiliser un détecteur d’or », a expliqué le Gouverneur Purusi.
Malgré la bonne foi du Gouverneur, la communication n’a guère rassuré l’opinion publique. Ses opposants et détracteurs en profitent pour renforcer le doute et le présenter comme un « voleur d’or et d’argent ».
Pourtant, le Gouverneur a promis une gestion transparente et rigoureuse, afin que ces richesses servent réellement à répondre aux besoins des populations locales.
Les rumeurs sur l’implication de la famille présidentielle
Une autre pression sur Jean-Jacques Purusi vient du soutien qu’il reçoit des acteurs et organisations de la société civile du Sud-Kivu dans la lutte contre l’exploitation illicite des minerais. En effet, lors d’une manifestation organisée à Bukavu le 8 janvier dernier et d’un sit-in quelques heures avant, les Forces vives du Sud-Kivu ont dénoncé le silence des autorités nationales face à la confusion autour de l’exploitation illicite des minerais en province.
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Dans une interview à la presse, la Présidente de la Société Civile du Sud-Kivu avait estimé que si aucune mesure n’était prise pour ne pas renvoyer un jet privé venu récupérer les minerais et l’argent saisis des mains des citoyens chinois, cela confirmerait les rumeurs sur l’implication de la famille Tshisekedi dans l’exploitation illicite des minerais. Depuis, les minerais n’ont pas été envoyés à Kinshasa, et les ressortissants chinois comparaissent devant la justice.
Cependant, la vidéo virale a suscité des remous au très haut niveau. Les opposants du Gouverneur Purusi se sont emparés de cette vidéo pour affirmer qu’il s’en était pris à la famille présidentielle à travers la société civile du Sud-Kivu, qui lui a apporté un soutien dans cette lutte. Ces allégations ont conduit à des réactions directes et fermes du gouvernement provincial, démentant toute implication du Président Tshisekedi et de sa famille.
Le gouvernement provincial a, par contre, salué le soutien du président Félix Tshisekedi dans la lutte contre l’exploitation illégale des ressources naturelles, tout en dénonçant la complicité de certains agents provinciaux et nationaux dans ces pratiques.
Ces mises au point ont-elles réussi à diminuer la pression sur l’autorité provinciale ? Rien n’est moins sûr, tant la manipulation des adversaires de Purusi autour de l’action citoyenne de la société civile du Sud-Kivu semble intense. Cette Société civile, qui l’a vu comme un allié dans ce combat de longue date, continue de jouer un rôle clé dans cette lutte.
Des décisions administratives et politiques controversées !
La pression sur Jean-Jacques Purusi passe aussi par des décisions controversées dans les nominations administratives et politiques en province. Depuis son arrivée à la tête de la province, le Gouverneur Purusi est accusé de ne pas respecter son allié, l’UDPS, le parti présidentiel.
La pomme de discorde réside d’abord dans la nomination des membres du cabinet du gouvernement provincial. Le parti présidentiel, l’UDPS (parti du Vice-Gouverneur), a dénoncé une volonté de l’exclure de la gestion de la province en privilégiant uniquement les membres de l’AFDC, le parti du Gouverneur Purusi. Depuis, malgré les appels à l’apaisement, les combattants de l’UDPS ne digèrent pas les agissements de l’autorité provinciale et font pression pour que leur quota soit respecté. La plus récente manifestation date de ce mardi 14 Janvier devant le Gouvernorat du Sud-Kivu.
Ces réclamations ne concernent pas seulement l’UDPS, mais également l’UNC de Vital Kamerhe, l’une des forces politiques à l’Assemblée Provinciale. En effet, malgré toutes les promesses faites à ce parti, le Gouverneur Purusi a agi sans tenir compte de leurs attentes, ce qui suscite l’indignation, même si ce parti préfère, pour l’instant, « observer ».
Mais avant tout cela, c’est à la Direction Provinciale de Mobilisation et d’Encadrement des Recettes (DPMER) que les critiques les plus vives ont été formulées contre le Gouverneur Purusi. Des agents l’accusent d’avoir procédé à une nomination politique dans cette régie financière provinciale, prétextant de vouloir maximiser les recettes. Ils l’accusent de violer toutes les procédures et règles de la DPMER en privilégiant des acteurs politiques de son camp.
A la DPMER, on accuse par exemple le Gouverneur Purusi d’avoir remplacé des Chefs des Divisions par de nouvelles unités issues de son camp politique. Actuellement, des agents remplacés multiplient les manifestations devant cette régie pour réclamer leurs arriérés de salaire et dénoncer une procédure « cavalière ».
Des actions concrètes qui tardent
Jean-Jacques Purusi a été élu dans un contexte politique tendu au Sud-Kivu. Il a remplacé Théo Ngwabidje, qui a dirigé la province d’une main de fer, sans pour autant réaliser des actions de développement concrètes. Pour les habitants du Sud-Kivu, l’arrivée du ticket Purusi-Elakano représentait un réel espoir dans une province confrontée à de nombreux défis, notamment en matière de sécurité et de développement social.
Cependant, depuis son arrivée, le Gouverneur Purusi peine à imprimer sa marque. La construction des infrastructures financées sur fonds propres du gouvernement provincial tarde encore, et les critiques se multiplient à l’égard de celui qui promettait actions et transparence dans la gestion des affaires publiques.
En attendant, les jours passent, et la pression sur Jean-Jacques Purusi ne semble pas faiblir. Entre accusations de vol de « l’or et d’argent », décisions administratives controversées et une communication souvent maladroite, le Gouverneur du Sud-Kivu doit faire face à une tempête qui ne semble pas prête à se calmer.
Mais peut-on vraiment juger l’homme sur quelques erreurs de communication et des rumeurs ? Ses engagements en matière de transparence et de développement local seront-ils suffisants pour dissiper le doute qui s’installe ?
En fin de compte, quel avenir pour le Sud-Kivu si les tensions politiques et les rivalités internes continuent de parasiter l’action publique ? Le temps, et les actions concrètes du Gouverneur, nous le diront, peut-être. Mais, pour l’instant, la question demeure : Purusi parviendra-t-il à surmonter la pression et à transformer les promesses en réalisations tangibles pour le bien-être de la population ?