Intervenons-nous

Le Congo se meurt de sa belle mort depuis qu’il cumule des savants dans différentes indisciplines scientologiques. Le trépas est toujours au rendez-vous lorsque l’on met à mêler savanterie et constitutionnalisme politologique ou cratologique. Ces deux-là ne font jamais bon ménage.

La savanterie s’en met toujours plein le ventre, au nom de la légitimité revendiquée de scientocratie, et finit souvent par perdre la tête, au grand malheur de la constitution du peuple qui en prend un coup (fatal). Depuis qu’il a vu un savant pérorer sur un perchoir, mon petit garçon me harcèle d’une question qui m’a désarçonné : qu’est-ce qu’un savant ? Je me résous enfin de lui répondre d’autant plus qu’il ne veut plus réaliser son rêve d’enfance, devenir un savant au service de l’homme et de la cité à la suite de son géniteur.

Le savant est un érudit, un être consacré à élucider et dévoiler le monde sensible, un homme d’immédiation dans un domaine ou une discipline donnée. L’intérêt de la science nécessite le désintéressement du savant. Telle est l’éthique savante. Mais il arrive qu’un savant s’émancipe de l’éthique. Là, il est frappé de cécité, il devient un outil d’occultation au service d’un Prince, parachuté ou autocréé. Il finit par devenir une menace pour la cité et même de la communauté des savants dont la légitimité et l’estime s’effritent alors. Nait ainsi la savanterie.

La savanterie prospère quand le ventre et l’ethnos s’emparent de la science, révélant la face cachée et macabre du savant sophistique. Ce dernier est pire que l’ignare. Il mobilise des théories pseudoscientifiques. Il complote contre la constitution de son pays, oubliant même ses combats antérieurs pour la protéger d’un viol par la vieille garde savantesque au service d’un passionné du Congo.

Il provoque un tourbillon fait de campagnes de propagande, achat des consciences, culte de personnalité, mystique du chef tribal, prises de position politiciennes enrobées d’une pseudoscience et mues par des cachets faits des billets verts, arguties et élucubrations anticonstitutionnelles constituées et accompagnées d’une loi de double condescendance parentale (comment donner de garantie scientifique sur la filiation paternelle par test ADN systémique et systématique pour assurer la pureté, que dis-je la purée nationale contre les appétits gloutons transnationaux des hordes des envieux voisins ?). Dès cet instant, la cité fait face à un grave péril. 

C’est à croire que la savanterie est irrémédiablement atteinte d’une obsession atavique de confiscation de pouvoir jusqu’au retour du Messie. Maranatha ! Et pourtant, même le très vénéré saint Pierre institué par le Christ n’a jamais pu garder le trône de son Maître jusqu’à son retour. Quand le gardien de la foi perd la foi, rien n’est pire. Tout dérive et déraille totalement surtout quand il est mu par sa seule foi en la magie de son guide tribal trivial dont le seul mérite est patenté patronymique. La flagornerie de la savanterie sophistique peut devenir constitutionaliste et constitutionnalisante.

Alors là ! Adieu la nation donnée en holocauste sur l’autel du communautarisme primaire et précaire.  Tous les mythes fondateurs de la nation sont détricotés et décousus. Le nombre et la durée du mandat présidentiel, à l’instar de la forme républicaine de l’Etat et des libertés des autres bandes et peuplades tribales, passent à la trappe. Tant pis à leur intangibilité ! Tant pis à leur verrouillage juristique à la con ! 

Tant que l’union de la nation est scellée sur du sable ou du sel, non que dis-je, du sucre, le monde s’agenouillera, l’accoutumance couronnera le reste. Les insectes et autres bestioles venus de partout, même d’outre mer et d’outre tombe seront attirés voire attrapés. C’est un grand bal qui rassemble tous les ex autour d’une ordalie mortifère. S’y retrouvent les ex maris rebelles, les ex époux volages, les ex kapitas généraux carcéraux, les ex alliés frontistes coloriables, les ex miliciens en chef, les ex tyrannosaures et autres dilophosaures, les ex croque-morts, les ex nécrophiles, les ex loups-garous, etc.

Sans oublier, bien entendu, les enfants des ex ! Tous brulent du même désir ardent de sang, d’argent et de pouvoir du peuple qui trinque du vinaigre. Ce mal s’aggrave quand la sénilité s’associe à la savanterie. La senescence prend le dessus, corrompant les survivances de la scientologie et de la savanterie. Se confondent pêlemêle ambition personnelle, dessein communautariste et constitutionalisme savantesque sans jamais créer d’alchimie comme savent le faire des viticulteurs. En effet, le vin s’améliore en vieillissant, entend-on, mais seulement le bon vin, car le mauvais empire en vieillissant. En témoigne une certaine savanterie sophistique constitutionaliste qui a investi la maison du peuple où ce dernier n’a plus aucun droit de cité.

Une constitution, c’est un esprit, des institutions et des pratiques politiques. L’esprit de la constitution doit inspirer profondément et fondamentalement la pratique des acteurs politiques et la vie des institutions. Une constitution est le ferment, le creuset de la nation, du vivre ensemble. Donc, une majorité politique d’aujourd’hui, fabriquée voire élue, ne peut pas, ne doit pas compromettre ce vouloir vivre ensemble en opprimant la minorité ou mieux la majorité silencieuse. Ce faisant, elle érode, parfois jusqu’à rompre, la cohésion nationale. 

La majorité temporelle ne doit pas l’oublier. Tout passe et rien ne demeure. La nation transcende le peuple d’aujourd’hui qui ne doit pas trahir le vouloir-vivre ensemble par des lois iniques, taillées sur mesure. Une loi taillée sur mesure est comme un costume sur mesure, il est bon, mais à condition que son porteur ne puisse prendre ni perdre du poids. Exercice ardu voire impossible. Si l’on venait à prendre ou perdre du poids, il faudrait donner son costume à un autre ou le ranger dans le placard car on ne peut plus le porter.

Mais, la savanterie est maniaque, sourde et autiste. Elle fait table rase sur son passage et dans la cité. Malheur au sage et au héraut des victimes ! leurs voix sont étouffées par la musique bruyante et assourdissante, parfois enivrante du bal des déconnectés dont la base est aux aguets pour bondir, mordre et croquer du sage de la nation, du héraut national, du héros du peuple d’abord.

Nul n’entend ce cri qui résonne et sonne du fond du pays comme un avertissement : ne touche pas à ma constitution. Au péril de leur vie ! Ils sont entrés dans l’histoire par la cheminée, ils en sortiront par la petite porte de service. Ainsi parle le Saigneur dont le peuple gagne toujours. 

Ainsi pensé le mardi le 23 avril 2023

Un citoyen intellectuel libre

Alphonse Maindo

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