Le mouvement citoyen Lutte pour le Changement (Lucha) a dans un communiqué de presse publié ce jeudi 12 août, demandé aux autorités congolaises de procéder à la levée de l’état de siège, décrété depuis le 6 mai 2021 au Nord-Kivu et en Ituri.
Dans ce communiqué, la Lucha parle d’une mesure exceptionnelle « qui ne produit pas de résultats » depuis son instauration par le président de la République, malgré les efforts financiers fournis pour cette fin.
« Trois mois après la déclaration de l’état de siège dans les provinces du Nord Kivu et de l’Ituri, la violence venant des groupes armés négatifs et des éléments de l’armée s’est intensifiée, les droits des citoyens sont de plus en plus piétinés et l’administration locale est complètement à l’arrêt » écrit la Lucha.
Parlant du côté négatif de cet état de siège, la Lucha affirme que depuis sin entrée en vigueur, au moins 533 personnes ont été tuées dans les provinces du Nord Kivu et de l’Ituri, soit une moyenne de 6 civils tués par jour.
Le mouvement citoyen soutient que malgré l’état de siège, les FARDC sont toujours rongées par ce qu’il appelle « affairisme » ainsi que le manque de soutien logistique et financier conséquent, de la part du gouvernement.
« Cela fait que les FARDC n’ont fait qu’assister impuissamment aux tueries des civils et les voir s’étendre aux zones géographiques qui étaient jadis calmes, » soutien la Lucha.
Sur le plan des droits de l’Homme, la Lucha note qu’il s’observe une hausse inquiétante des violations des droits de l’Homme.
» La restriction forte de l’espace civique ainsi que des difficultés d’accès à la justice depuis l’instauration de l’état de siège. Les membres des services de sécurité se croient désormais tout permis et n’hésitent pas d’arrêter, de torturer, d’imposer des frais illégaux aux citoyens pour des faits non infractionnels. Les libertés publiques sont carrément mises en veilleuses et toutes les voix discordantes sont vigoureusement réprimées par un puissant arsenal militaire visiblement préparer à taire toute protestation contre la persistance de l’insécurité plutôt que taire l’insécurité elle-même, » regrette-t-elle.
Sur le plan de la gouvernance locale, la Lucha explique que l’état de siège « a complètement normalisé le dysfonctionnement de l’Etat, paralysé l’administration et bloqué les initiatives de développement locale » en ordonnant le remplacement des dirigeants civils par des militaires qui ne sont « ni formés, ni destinés à administrer les entités territoriales. »
« Au Nord-Kivu comme en Ituri, il s’observe une tendance dangereuse à focaliser les actions de gouvernance vers des initiatives d’enrichissement des nouvelles autorités sur le dos des paisibles citoyens dont le pouvoir économique a été largement affaibli par des années de conflit. Le fait que les activités des assemblées provinciales soient suspendues pendant l’état de siège et que les libertés publiques soient très largement surveillées compromet toute initiative de contrôle de la gouvernance des dirigeants militaires et accroit le risque sérieux de prédation des ressources publiques » explique la Lucha.
Pour la Lucha, le manque d’une évaluation « sans complaisance » au préalable des causes et des acteurs des violences armées ainsi que des échecs des opérations militaires successives précédentes depuis 2014, constitue la base de « l’échec » de l’Etat de siège, malgré la bonne foi des populations et des organisations qui se sont résignées à l’accepter.
Elle pense qu’il faut maintenant tirer les leçons de ces limites majeures de l’état de siège comme stratégie de pacification, et envisager des alternatives crédibles.
C’est entre autres, une évaluation « transparente, sans complaisance » de la situation sécuritaire, avec la participation des populations affectées, afin d’identifier les vrais remèdes aux tueries, à l’insécurité et aux violences armées à l’Est de la RDC et les appliquer.
Bertin Bulonza