Intervenons-nous

Pour ce quatrième numéro de « Mon point de vue » du 30 décembre, Nicolas Kyalangalilwa revient sur la résolution du Conseil de Sécurité des Nations Unies du 20 Décembre 2021, portant prorogation du Mandat de la MONUSCO en RDC.

Le Conseil de sécurité a décidé  de proroger d’un an, soit jusqu’en décembre 2022, le mandat de la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et de sa brigade d’intervention. Le Conseil a approuvé également la stratégie de retrait progressif de la Mission.

Lire aussi: RDC : Tshisekedi et la Justice (Mon Point de vue Ep.2 )

Quelle lecture faire de cette prorogation dans un contexte de plus en plus contestataire de l’efficacité de cette mission onusienne qui est, vous vous souviendrez, la plus grande au monde ? Les gens commencent à se fatiguer de la présence de cette mission alors que la situation sécuritaire ne semble pas s’améliorer.

D’autres vont jusqu’à taxer cette mission de source d’instabilité dans la région- car disent-ils « No war, no job ». Des déclarations et manifestations diverses appelant au départ de la mission onusienne se font entendre ça et là…et pourtant le Conseil des Nations Unies décide encore une fois de proroger le mandat de la MONUSCO pour une année.

D’aucun comprendrait en ce geste un aveu des nations Unies que la situation à l’est de la RDC est loin  de s’améliorer, et donc nécessite la présence continue de la MONUSCO. La question qui demeure est de savoir pourquoi les résultats ne sont pas au rendez-vous ?

Certes, depuis la présence des nations unies (au début des années 2000) en RDC, les choses ont sensiblement avancé, comment alors expliquer que la mission a du mal à « boucler la boucle » ? Qu’est-ce qui empêche à la MONUSCO d’en finir avec les groupes armés et de rétablir la paix dans cette région de la RDC ?

Diverses propositions ont été faites dans le temps pour une meilleure efficacité de la mission onusienne.

Des cris se sont levés pour demander qu’un envoyé spécial pour la région soit nommé car les conflits avaient des ramifications régionales. Un envoyé spécial pour la région des grands lacs a été désignés et un accord (l’accord cadre d’Addis-Abeba a été signé sous son égide et sa facilitation) pourtant, les conflits continuent toujours à avoir des ramifications régionales.

Qu’est-ce qui n’a pas marche ? A un moment on a demandé que la mission ait un mandat plus agressif afin d’aider les FARDC dans la traque des groupes armés qui déstabilisaient la région. Elle est dotée maintenant d’une unité mobile d’intervention qui a mandat d’intervenir si les civils sont en danger. Et pourtant on compte des morts tous les jours. Qu’est-ce qui doit être fait d’autre ?

Je crois à mon humble avis que c’est cette évaluation continue et objective de la MONUSCO qui manque.

Son départ n’est pas la solution s’il n’est pas consécutif à la fin de l’activisme armé dans la partie Est de la RDC.

Dans certains coins du pays, (les Hauts et Moyens Plateaux de Fizi, Mwenga et Uvira par exemple), c’est la MONUSCO qui a une vitesse d’intervention plus agile que nos forces de sécurités. Son absence dans les milieux conduirait à une crise plus accentuées. Cette situation n’est pas idéale mais elle est la réalité dont il faut faire avec pour l’instant. Pour que la MONUSCO soit efficace, et ne se pérennise pas (et ne pas servir de « béquille » au gouvernement congolais mais aussi sans quitter d’une manière précipitée et précoce), il faut une mise en place d’un certain nombre des mécanismes. J’en propose deux :

Il faut un organe gouvernemental, avec des branches en province qui suivra d’une manière objective du point de vue de la RDC l’efficacité des actions de la MONUSCO. Peut-être un ministère ou alors un Haut-commissariat, uniquement dédié aux relations avec les Nations Unies (en RDC et le bureau de l’envoyé spécial pour la région des Grands-Lacs). Cet organise définira ensemble avec les Nations-Unies les objectifs ainsi que la stratégie appropriée pour que la mission réussisse ses objectifs- la pacification et stabilisation de l’Est de la RDC.

Il faut aussi un cadre tripartite de suivi et évaluation de l’efficacité de la mission onusienne entre la MONUSCO, la Société Civile et le gouvernement congolais.

Ce cadre pourra faire l’évaluation dans le temps des actions planifies, et décider de leur succès ou échec, en comprendre les causes et s’assurer que ces mêmes échecs ne se répètent plus.

C’est à partir de ce cadre que des propositions seront formulées sur les éléments nécessaires à inclure dans le mandat de la mission onusienne. A ma connaissance un tel cadre n’existe pas. Et aussi longtemps que celui-ci n’existera pas, la question de la nécessité et de l’objectivité de la présence de la MONUSCO en RDC se posera.

Lire aussi: Instabilité provinciale : que Kinshasa laisse les provinces en paix ! (« Mon point de vue » Ep.3)

Au lieu donc d’exiger le retrait de la mission onusienne sans que l’activisme des groupes armés à l’Est de la RDC ne soit terminé, les forces vives et politiques devraient plutôt s’atteler à s’assurer que l’action de la MONUSCO est continuellement évaluée, les obstacles enlevés afin que sa mission soit achevée. Alors, il n’y aura plus raison pour les casques blues de rester en RDC. Mais aura-t-on ce courage, l’audace  (et le poids) politique pour se doter de ces mécanismes de contrôle pour la plus grande mission onusienne au monde ?

Rév. Nicolas Kyalangalilwa

Acteur de la Société Civile

A propos de « Mon point de vue » 

« Mon Point de vue » est une chronique d’analyse de l’actualité provinciale, nationale et régionale animée par Nicolas Kyalangalilwa, célèbre, fervent acteur de la Société Civile et diffusée sur la radio Jambo FM émettant sur 92.0 MHz à Bukavu au Sud-Kivu. Elle est diffusée tous les lundis, jeudis et dimanches à 20 heures 15. La rediffusion de ces épisodes se fait les mardis, vendredi et lundi à 8 heures du matin. LaPrunelleRDC vous les proposera également en écrit et en audio.

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