Denis Mukwege est intervenu ce lundi 31 août 2020 à l’occasion de la réunion extraordinaire de la Sous-Commission des droits de l’homme du Parlement européen; au sujet de la justice transitionnelle en RDC.
Dans son discours, le prix Nobel 2018 a demandé au Parlement européen de s’engager par une résolution forte; en vue de soutenir la mise en place d’un Tribunal pénal international pour la RDC.
Selon lui, la création de cette instance judiciaire s’avère importante, étant donné que la Cour pénale internationale n’est compétente que pour les crimes commis après juillet 2002; «alors que l’inventaire des crimes effectué dans le rapport Mapping couvre la période allant de 1993 à 2003;» mais aussi puisqu’il faut tenir compte de la dimension régionale du conflit en RDC; «où diverses armées étrangères et divers groupes rebelles appuyés par des pays voisins sont intervenus sur le territoire congolais; et doivent être aussi être tenus responsables des exactions qui ont été commises.»
Pour que justice soit rendue au niveau domestique, il faudrait donc, selon Denis Mukwege, des accords d’extradition et une coopération judiciaire très efficace avec tous les pays impliqués; notamment l’Ouganda, le Rwanda et le Burundi, ce qui n’existe pas encore et qui nécessiterait une réelle volonté politique de tous les Etats concernés.
«Nous appelons tous les Etats européens à faire usage du principe de la compétence universelle pour poursuivre ou extrader tous les auteurs présumés des crimes les plus graves commis en RDC. Cette situation qui fait honte à notre humanité commune ne peut plus durer. Nous espérons que le Parlement européen va s’engager par une résolution forte en vue de soutenir la mise en place et la mise en œuvre d’une stratégie de justice holistique en RDC. Le manque de volonté politique et la realpolitik ont trop longtemps primé sur le besoin et la soif de justice et de vérité. C’est dans ce contexte que les massacres se poursuivent dans l’impunité.» a-t-il dit.
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Mukwege plaide donc pour une intervention du Conseil de Sécurité de l’ONU qui, sur base du chapitre VII de la Charte des Nations; pourrait établir un Tribunal pénal international ad hoc pour la RD Congo; ce qui créerait le cadre nécessaire pour que tous les Etats soient obligés de coopérer pleinement avec cette instance de poursuite et de jugements des crimes internationaux commis en RDC; par des Congolais ou par des ressortissants étrangers.
Que ce soit pour l’établissement d’un Tribunal pénal international pour la RD Congo ou de chambres spécialisées mixtes; Mukwege préconise que la compétence temporelle devrait s’étendre du début des années 90 jusqu’à aujourd’hui.
«En nous soutenant sur ce chemin de la paix, vous répondrez non seulement à la soif de vérité et de justice des victimes Congolaises; mais vous contribuerez aussi à réaffirmer les valeurs fondamentales de l’Union européenne dans ses relations extérieures; et à consolider la paix et la stabilité au cœur de notre grand continent africain; qui continue de saigner tous les jours et à grossir le flux migratoire vers l’Europe avec ses conséquences politiques, sociales et économiques.» a dit Denis Mukwege.
Museza Cikuru