Ce 4 mars 2021, la Chambre de première instance II de la Cour pénale internationale (« CPI » ou « la Cour ») a rendu publique une version expurgée de sa décision datée du 14 décembre 2020 dans l’affaire Le Procureur c. Thomas Lubanga Dyilo, par laquelle elle approuve la mise en œuvre de réparations collectives aux victimes prenant la forme de prestations de services.
La Chambre, composée de M. le juge Marc Perrin de Brichambaut, juge président, Mme la juge Olga Herrera-Carbuccia et M. le juge Péter Kovács, approuve le programme proposé par le partenaire du Fonds au profit des victimes que ce dernier a sélectionné afin de mettre en œuvre les réparations collectives prenant la forme de prestations de services. Ce programme inclut, entre autres, des projets visant des soins de santé mentale et physique, et des projets visant l’amélioration de la situation socio-économique y compris des formations scolaires, universitaires et professionnelles, des cours de langues et de rattrapage scolaire, des activités génératrices de revenus ainsi que des allocations de subsistances et pensions. Elle a cependant noté que la mise en œuvre des réparations collectives devra se matérialiser dans un contexte sécuritaire et sanitaire complexe.
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La Chambre a considéré que les projets proposés, sous réserve des précisions apportées et garanties demandées par la Chambre dans sa décision, permettent d’atteindre la plupart des objectifs fixés par la Chambre d’appel, à savoir soulager les souffrances causées par les crimes commis par Thomas Lubanga, rendre la justice en faveur des victimes en atténuant les conséquences des actes illicites et contribuer à la réintégration effective d’anciens enfants soldats. La Chambre a également estimé que les projets prévus/activités prévues « visent à faciliter la réintégration des victimes directes dans la société, compte tenu des répercussions différentes de ces crimes selon que la victime est un garçon ou une fille » et « offrent aux victimes des possibilités d’éducation et de formation professionnelle, ainsi que des possibilités d’emploi durable leur permettant de jouer un rôle utile dans la société ». La Chambre considère à ce propos que le programme proposé est approprié en ce qu’il permettra de répondre aux besoins variés et évolutifs des victimes directes et indirectes suivant leurs circonstances spécifiques, et ce, de manière flexible.
Elle a également ordonné au Fonds au profit des victimes d’inclure dans ses prochains rapports trimestriels toute l’information pertinente concernant les progrès réalisés dans la mise en œuvre des réparations collectives. Les représentants légaux des victimes et le Bureau du conseil public pour les victimes auront le droit de déposer des observations en réponse aux prochains rapports trimestriels du Fonds.
Le nombre de victimes ayant droit aux réparations collectives dans cette affaire s’élève à jour à 1045.
Contexte
Thomas Lubanga Dyilo est un des fondateurs de l’Union des patriotes congolais (UPC), dont il a été Président, et des Forces patriotiques pour la libération du Congo (FPLC), dont il a été commandant en chef. Le 14 mars 2012, la Chambre de première instance I de la Cour pénale internationale l’a déclaré coupable, en tant que coauteur, des crimes de guerre de conscription et d’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans les FPLC et du fait de les avoir fait participer activement à des hostilités entre septembre 2002 et août 2003. Le 10 juillet 2012, il a été condamné à une peine totale de 14 ans d’emprisonnement. Le 1er décembre 2014, la Chambre d’appel a confirmé la déclaration de culpabilité et la décision relative à la peine de 14 ans d’emprisonnement. Le 19 décembre 2015, Thomas Lubanga a été transféré à la prison de Makala en RDC pour y purger sa peine. Le 15 mars 2020, Thomas Lubanga a été libéré après avoir servi 14 ans de prison.
Le 18 juillet 2019, la Chambre d’appel de la CPI a confirmé en grande partie la décision de la Chambre de première instance II, du 15 décembre 2017, fixant le montant des réparations auxquelles Thomas Lubanga Dyilo est tenu. La Chambre de première instance avait également, le 21 octobre 2016, approuvé et ordonné de commencer la mise en œuvre d’un plan présenté par le Fonds au profit des victimes de réparations collectives symboliques, et, le 6 avril 2017, un programme cadre portant sur les réparations collectives prenant la forme de prestations de services en faveur des victimes en relation avec l’affaire à l’encontre de Thomas Lubanga Dyilo.