Intervenons-nous

    Le naufrage sur le lac Kivu n’est point un simple drame ; c’est un symbole tragique d’un naufrage bien plus profond : celui des valeurs dans tous les secteurs de la vie publique en RDC. La corruption, tel un poison insidieux, a infiltré chaque recoin de notre société, transformant notre quotidien en un parcours semé d’embûches, où l’intégrité est devenue une rareté. Les paroles du Gouverneur Jean-Jacques Purusi, dénonçant ces « Coop » infâmes, résonnent tel un cri de désespoir, un appel pressant à la responsabilité collective.

    Ce naufrage, c’est aussi des vies brisées, des rêves engloutis, des familles dévastées — le tout pour satisfaire les appétits voraces de quelques malandrins. Les agents des services de sécurité, censés veiller à notre salut, se sont laissés corrompre, préférant extorquer des pots-de-vin pour des autorisations d’embarquement. À la place d’assurer une protection véritable, ils choisissent le sordide gain facile, compromettant ainsi la sécurité de l’ensemble de la population.

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    Et que dire de l’acquisition des documents officiels ? Le processus s’est mué en un véritable chemin de croix. Pour obtenir un passeport congolais, dont le prix est officiellement fixé à 99 dollars, il faut souvent débourser près de 200 dollars. Ce dépassement, devenu une norme insupportable, est accepté avec résignation par une population épuisée par cette corruption ambiante.

    À quel moment avons-nous consenti à vivre dans un système où la sécurité et les droits fondamentaux peuvent être négociés comme de simples marchandises ?

    Ce naufrage des valeurs se manifeste dans chaque facette de notre existence : des écoles aux hôpitaux, en passant par l’administration publique. La surcharge des bateaux et l’absence de gilets de sauvetage ne sont que des manifestations d’un cynisme abject, mais il ne s’agit là que d’une facette d’un problème bien plus vaste.

    Combien de naufrages encore avant que la colère ne gronde dans les rues de Goma et Bukavu ?

    Combien de familles devront pleurer leurs proches avant que les véritables responsables ne soient traduits devant la justice ? Les promesses non tenues, telles celles des gilets de sauvetage, ne sont qu’un symbole d’une trahison inacceptable, un affront à la mémoire des victimes.

    Il est grand temps de ne plus demeurer muets face à cette impunité qui gangrène nos institutions.

    Alors que nous pleurons nos morts, le Gouverneur appelle à l’action. Oui, il faut arrêter ceux qui ont participé à cette chaîne d’irresponsabilité. Mais il est également essentiel de transformer ce système corrompu. Il faut dépoussiérer les rouages de l’administration, nettoyer les écuries d’Augias qui abritent ceux qui se nourrissent de l’angoisse des populations.

    Nous ne pouvons plus rester muets face à cette impunité qui gangrène nos institutions. Purusi a osé briser le silence : « Ce sont des voleurs et des irresponsables ». Ces mots doivent provoquer non seulement des applaudissements, mais une révolte. La gestion de la chose publique n’est pas un terrain de jeu pour des opportunistes ; c’est une responsabilité sacrée que l’on doit honorer, non trahir.

    Il ne suffit pas d’arrêter quelques malfaiteurs ; il nous faut une véritable révolution morale. 

    Les habitants du Kivu et de la RDC ne demandent pas seulement des promesses creuses, mais des actions significatives. Ils méritent des institutions qui fonctionnent, des services qui respectent leurs droits et leurs besoins.

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    Il est temps de faire entendre notre voix et de réécrire l’histoire de notre pays. La douleur des victimes doit se transformer en force collective, en exigence d’un changement radical.

    Le Kivu mérite des leaders dignes de ce nom, des hommes et des femmes qui placent l’intérêt commun au-dessus de leurs ambitions personnelles.

    Le temps est venu de se lever, de crier, de revendiquer. La corruption n’est pas une fatalité, mais le résultat de notre complicité silencieuse. En fermant les yeux sur ces « Coop », nous sommes complices de cette tragédie.

    Ce naufrage des valeurs doit être un tournant, un moment de prise de conscience collective. Ne laissons pas la mémoire de ceux qui souffrent sombrer dans l’oubli. Levons-nous pour défendre notre dignité, notre sécurité, et la promesse d’un avenir meilleur. C’est notre combat, et il doit commencer maintenant.

    Claudine Kitumaini

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