Des habitants de la République Démocratique du Congo s’apprêtent à se rendre aux urnes d’ici le 20 décembre 2023. La campagne électorale commence, elle, ce 19 novembre 2023 mais de nombreux électeurs risquent de ne pas y participer à cause des cartes ayant des écrits illisibles. Dans certaines régions comme Kabare la colère est montée d’un cran pour exiger du sérieux de la part de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI).
Une forte mobilisation ce mercredi 1er novembre à Kavumu et environs. Des habitants du groupement de Bugorhe dans le territoire de Kabare (Sud-Kivu) ont manifesté leur inquiétude. Ceux-ci craignent qu’ils ne puissent pas voter en décembre prochain. En cause : leurs identités ni photos ne sont plus lisibles sur leurs cartes d’électeurs.
La carte d’électeur constitue pour l’instant, la carte d’identité des congolais. Mais face à l’illisibilité des écrits, des victimes perdent leur identité. Ils font donc face à plusieurs tracasseries de la part des membres des forces de défense et de sécurité.
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D’autres problèmes se posent lors des retraits d’argent dans des institutions financières mais aussi pendant les voyages à l’intérieur du pays.
« Nous demandons à la CENI de rendre disponible au moins une machine par groupement pour imprimer des duplicatas aux électeurs pour lesquels les écrits sont illisibles. Des électeurs de cette partie du territoire de Kabare souffrent de tracasseries. D’autres ont du mal déjà à voyager car leurs cartes illisibles ne sont plus acceptées même au niveau des ports, aéroports, frontières et aux banques et/ou Coopérative d’épargne et de crédit », a expliqué l’un des manifestants.
Des manifestants en colère scandaient des chansons demandant à la CENI de respecter leurs droits.
Ces derniers portaient des calicots, des feuilles et branches d’eucalyptus en mains pour manifester leurs ras-le-bol. Avec des sachets en couleur noire sur les têtes, les manifestants ont marché sur l’artère principale jusqu’au bureau du groupement de Bugorhe.
Des représentants des différentes organisations de la Société Civile locale, ont lu et déposé leur mémorandum entre les mains des autorités de la place. Dans leur mémorandum, des manifestants ont également demandé à la Centrale Électorale de rendre public le fichier électoral tout en tenant compte du nombre réel des habitants qui se sont enrôlés.
« …à la CENI de procéder à la publication immédiate du fichier électoral en respectant le nombre total des citoyens qui se sont fait enrôlés dans différents centres en province, conformément à la loi électorale ; ainsi qu’au rétablissement des bureaux et centres de vote dans le but de lutter contre les embouteillages au moment de vote ».
Un seul lieu de livraison de duplicatas
Pourtant, la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) a déjà ouvert ses portes pour le retrait des duplicatas et le changement de ces lots de cartes aux écrits illisibles. Mais une opération qui semble difficile pour de nombreux habitants des territoires.
En effet, pour un territoire comme Kabare, ouvrir un seul lieu comme centre d’octroi de duplicatas est simplement irréaliste. Pourtant, de nombreux électeurs sont victimes et se retrouvent aussi à des centaines de kilomètres du centre d’octroi de ces nouvelles cartes.
Cette situation ne se pose pas seulement à Kabare. A Walungu par exemple, la candidate député nationale Brigitte Akonkwa a également exprimé les frustrations des nombreux habitants. Sur place, a-t-elle constaté, des centaines d’habitants relèvent cela comme principal frein à leur participation.
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A Walungu également, le centre de livraison de duplicatas se trouve à Walungu-Centre (groupement de Walungu) dans un territoire avec deux chefferies et plus de 20 groupements élargis sur des centaines de kilomètres carrés.
Difficile également pour un habitant de Kamanyola, celui de Nyangezi, Kaziba, Lurhala, Mushinga, Rubimbi ou Kamisimbi de se procurer facilement d’une carte d’électeur duplicata.
« Comment allons-nous voter ? » s’interroge un citoyen de Mwenga devant un candidat député national.
Prochaine bombe ?
Pour l’instant, la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) est sur la dernière ligne droite de la préparation des élections. Des élections dont la régularité est toujours mise en cause par de nombreux acteurs.
Malgré les écrits, les alertes de plusieurs acteurs sociaux dans les territoires, l’équipe de Kadima semble faire la sourde oreille sur un problème pourtant réel et sérieux qui pourrait être le plus grave de ce processus.
En effet, si des habitants de Bugorhe ont manifesté pour demander des cartes avant les élections, d’autres continuent à se poser la même question partout dans les territoires.
Nombreux, encore silencieux actuellement n’attendront peut-être pas le 20 décembre 2023 pour exprimer leur colère.
La CENI est-elle prête à porter la responsabilité des événements liés à l’exclusion de plusieurs milliers, des millions des congolais à ce droit et devoir civique ?
En tout cas, pour de nombreux observateurs, les responsables de cette centrale électorale doivent tout mettre en œuvre pour permettre à ces citoyens de voter, eux aussi sans difficulté. Sinon, cette question risquerait d’être la prochaine bombe pour ce processus électoral. Une bombe dont il faut à tout prix éviter l’explosion !
La CENI parviendra-t-elle à la désamorcer ? C’est ce qu’on verra !