L’Assemblée nationale de la RDC a autorisé ce lundi 18 avril 2022 la 22ème prorogation de l’état de siège, dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, pour une période supplémentaire de 15 jours, prenant cours mercredi 20 avril 2022.
Selon le Gouvernement, cette énième prorogation permettra aux Forces de défense et de sécurité, appuyées par l’armée ougandaise, « de consolider les acquis des opérations antérieures ».
Mais aussi de poursuivre l’envergure des actions « en vue de mettre fin à l’aventure terroriste », et restaurer la sécurité, la paix et l’autorité de l’État dans cette partie du pays.
Lors de la plénière de ce lundi, la Ministre de la Justice, Rose Mutombo a fait savoir qu’il est indispensable qu’un temps soit accordé à l’armée, pour la poursuite des opérations militaires en vue du retour de la paix dans la partie Est.
«Etant donné que l’armée nationale présentement à l’œuvre, dans une mutualisation des forces avec l’armée ougandaise pour le retour de la paix dans cette partie du territoire national, il est indispensable qu’un temps soit accordé pour la poursuite des opérations militaires enclenchées à cet effet sur terrain,» a expliqué la ministre de la Justice, citée par 7sur7.cd.
Sur 317 élus présents à la plénière, 314 ont voté pour la prolongation, 2 se sont opposés et un s’est abstenu. A peine la majorité des élus de cette chambre basse qui compte un bon demi-millier de députés a donné le feu vert à cette nouvelle prorogation, alors que leurs collègues du Nord-Kivu et de l’Ituri ont séché la séance plénière de ce jour.
Ils disent ne pas vouloir prendre part à la reconduction de cette mesure exceptionnelle mise en place depuis près d’un an déjà, et qui n’a pas su arrêter les tueries des civils qui se poursuivent dans leurs provinces respectives.
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Ces élus disent avoir été informés qu’à part l’état de siège, il n’y a pas d’autres options envisagées par le pouvoir en place, en vue de lutter contre l’insécurité dans cette partie du pays.
«Chaque jour nous voyons nos populations tuées, nous voyons nos mamans, nos sœurs et nos enfants assassinés brutalement par des groupes armés. Nous avons tous salué la décision du Chef de l’État de mettre en place l’état de siège qui avait comme objectif de ramener la sécurité et la paix au Nord-Kivu et en Ituri, malheureusement il est constaté que malgré l’état de siège nous continuons à déplorer chaque jour des morts dans tous les territoires de nos deux provinces respective,» a déclaré le député Singoma Mwanza, cité par Actualite.cd. «Nous nous posons la question, est-ce que réellement l’état de siège pourra mettre fin à cette situation des massacres ? On continue à insister que ce soit la seule solution. Et malheureusement nous constatons aussi que l’état de siège a basculé plus vers une pression fiscale, mobilisation des recettes, au lieu de se concentrer sur la sécurité et la paix,» ajoute-t-il, s’exprimant au nom de ses collègues du Nord-Kivu et de l’Ituri.
Ces élus ont décidé de ne plus prendre part à aucune autre plénière portant sur la prorogation de l’état de siège. Et ce, jusqu’à ce leurs voix sont entendues. «Les cris ne sont pas les nôtres, ce sont les cris de nos populations qui sont tuées,» indique le député Singoma Mwanza.
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Pour rappel, Félix Tshisekedi a décrété l’état de siège dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu depuis le jeudi 6 mai dernier Il avait dit vouloir mettre « rapidement » fin à l’insécurité devenue grandissante dans ces deux provinces. Mais près d’une année après, la sécurité des civils s’y est nettement dégradée, comparativement à la période d’avant. Députés et Société Civile du Nord-Kivu et de l’Ituri demandent la requalification des objectifs de cette mesure exceptionnelle, et sa délimitation dans le temps.
Des revendications difficiles à satisfaire, d’autant plus qu’en septembre 2021, le Président congolais avait déclaré devant l’ONU, que l’état de siège ne sera levé que « quand les circonstances qui l’ont motivé disparaîtront ». Une nouvelle prorogation pour 15 jours supplémentaires devrait sans doute intervenir d’ici le 5 mai 2022, un an jour pour jour après la proclamation de cette mesure exceptionnelle.
Museza Cikuru