Intervenons-nous

Face à la montée de l’insécurité et à la précarité économique, plusieurs radios communautaires du Sud-Kivu ferment temporairement leurs portes ou réduisent leurs activités. C’est notamment le cas à Nyangezi, où la radio Colombe FM a suspendu ses émissions en raison de craintes d’affrontements imminents dans la région.

« La radio Colombe FM a vu son signal coupé. La cause ? La crainte d’un affrontement imminent dans la région de Nyangezi », confie Ezéchiel Mushagalusa, rédacteur en chef de la station.

Des rumeurs persistantes sur une attaque armée ont semé la panique au sein de la population locale, affectant aussi les journalistes, contraints de faire face à une insécurité croissante et à un climat de peur.

Malgré la suspension des émissions, une poignée de journalistes poursuit son travail en coulisse, assurant un service minimum d’information dans l’espoir d’un retour à la normale.

« On ne peut pas tout arrêter. On continue de travailler dans l’ombre, en attendant que la situation s’améliore », explique Ezéchiel.

Dans un contexte tendu, la station tente de rester un repère d’information fiable pour éviter d’amplifier la psychose. Mais le défi est immense.

La fermeture des radios communautaires ne se limite pas à une perte technique : elle isole les populations rurales, souvent dépourvues d’autres sources d’information. Dans des zones reculées, la radio reste le seul lien direct entre les habitants et l’actualité locale, un rôle crucial en période de crise.

« Dans un contexte de rumeurs et d’incertitudes, la radio communautaire reste souvent le seul lien fiable entre les populations isolées et l’information », souligne un acteur local de la Société Civile.

Lire aussi: Masisi : Une radio communautaire vandalisée par des rebelles du M23 à Kitshanga

Les journalistes, quant à eux, souffrent en silence. Stress, anxiété, peur permanente… La pression psychologique est énorme. Accusés de « fuir » s’ils se protègent, ou de « créer la panique » s’ils informent, ils se retrouvent dans une impasse morale.

« Nous sommes tous traumatisés. Pourtant, c’est nous qui donnons encore à la population une raison de rester à la cité », confie Ezéchiel Mushagalusa.
« Si vous fuyez, c’est nous que vous fuyez, nous disent certains. Alors, nous restons là, bon gré mal gré, espérant que le pire n’arrivera pas », ajoute-t-il.

Dans une région où l’État peine à assurer la sécurité, les radios communautaires jouent un rôle essentiel d’information, de cohésion sociale et de sensibilisation. Leur silence forcé est un coup dur pour la démocratie locale et la résilience communautaire.

Les professionnels des médias plaident pour un soutien accru, une protection renforcée et une reconnaissance du rôle vital que jouent les radios de proximité dans un environnement fragilisé par l’insécurité et les difficultés économiques.

Cet article a été produit dans le cadre du projet Habari Za Mahali, porté par le Consortium RATECO-REMEL, avec le soutien de Media4Dialogue de la Benevolencia.

Share.
Leave A Reply

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.