Intervenons-nous

Dans une lettre adressée au Directeur général de la Direction Générale de Migration (DGM), la Société Civile du Sud-Kivu exprime sa profonde inquiétude face aux conséquences de la note circulaire n°06/DGM/DG/895/025 du 6 juin 2025, interdisant l’utilisation de documents migratoires délivrés par les autorités de fait de la rébellion M23-AFC. Elle appelle à une révision urgente de cette décision, en raison des souffrances accrues qu’elle engendre pour les populations de l’Est de la RDC, déjà affectées par le conflit armé.

Selon la coordination provinciale dirigée par Me Néné Bintu, de nombreux citoyens congolais ont été refoulés à Nairobi et Addis-Abeba, leurs documents migratoires étant considérés non valides car délivrés dans des zones sous contrôle rebelle. Cette situation complique sérieusement la circulation entre Bukavu et Uvira, les populations étant contraintes de payer d’importantes sommes pour franchir les barrières ou de traverser des zones dangereuses à pied ou à la nage, comme la rivière Ruzizi.

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Le Burundi, invoquant la souveraineté de la RDC, refuse également l’entrée aux détenteurs de ces documents, ce qui empêche de nombreux malades chroniques et étudiants congolais de voyager. Certains malades sont décédés faute d’accès aux soins médicaux, tandis que des étudiants sont bloqués, incapables de retourner à leurs universités ou de rentrer chez eux.

Les citoyens du Sud-Kivu n’ont plus accès à leurs comptes bancaires, aux soins médicaux, ni à leurs documents officiels. La Société Civile s’interroge sur la responsabilité de l’État : « Où est la faute des paisibles citoyens dans tout ça ? Ne revient-il pas au gouvernement de protéger ses citoyens et leurs biens ? », peut-on lire dans la lettre.

La lettre dénonce également une infiltration économique du Rwanda, pays accusé d’agression. De nombreux Congolais ouvrent désormais des comptes dans les banques rwandaises et s’y approvisionnent en denrées alimentaires, faute de contrôle sanitaire côté congolais. Cette dépendance croissante est jugée dangereuse à long terme.

La Société Civile rappelle son engagement constant contre la balkanisation du pays et craint que cette mesure n’alimente indirectement des projets expansionnistes. Elle cite les manifestations du 27 janvier 2025 à Bukavu comme preuve de sa mobilisation patriotique, et appelle les autorités à ne pas affaiblir la cohésion nationale.

Le mutisme des députés et sénateurs originaires du Sud-Kivu est critiqué : « Tout le monde s’agite autour du remaniement gouvernemental, oubliant les besoins fondamentaux de la population. Cela n’est pas patriotique ! », s’indigne la coordination.

Cette décision de Kinshasa arrive alors qu’obtenir un passeport congolais est devenu un véritable « parcours du combattant », note la lettre.

Les difficultés liées au changement de prestataire pour la production des passeports affectent particulièrement les populations de l’Est.

La Société Civile exhorte la DGM et le gouvernement à revoir leur position pour alléger les souffrances des habitants du Sud-Kivu. Elle appelle également à plus de gouvernance, transparence, justice, et à un engagement actif de Kinshasa pour sauver une population « martyrisée et traumatisée ».

« La capitale ne doit pas rester calme. Elle doit rassurer et protéger cette population qui ne peut pas subir à la fois l’agression rwandaise et l’isolement administratif », conclut la lettre signée par Me Néné Bintu Iragi, Présidente du Bureau de Coordination provinciale de la Société Civile du Sud-Kivu.

Freddy Ruvunangiza

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