Intervenons-nous

La République démocratique du Congo franchit une étape historique dans la reconnaissance internationale des violations graves des droits humains et des crimes internationaux commis sur son territoire depuis 1997. Ce lundi 10 novembre 2025, le ministre des Droits humains, Samuel Mbemba Kabuya, a annoncé lors d’un point de presse l’adoption de deux résolutions majeures qui reconnaissent et condamnent officiellement les génocides perpétrés en RDC.

Ces décisions ont été prises en marge de la 85ᵉ session ordinaire de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP), tenue du 7 au 30 octobre 2025, en ligne et à Banjul, en Gambie. Cette session a rassemblé des experts, des membres de la société civile africaine et des représentants des États, dans le cadre du mandat de la Commission de promotion et de protection des droits de l’homme sur le continent, tel que prévu par l’article 45 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.

Lire aussi : RDC : Lancement de la formation de 2.500 nouveaux magistrats à Kinshasa et Lubumbashi

« Nous sommes devant vous pour vous annoncer que deux résolutions reconnaissant les génocides commis en République démocratique du Congo ont été adoptées », a déclaré le ministre.

La première résolution, adoptée par la Société civile africaine, reconnaît formellement les atrocités perpétrées dans l’Est du pays comme des actes de génocide. Cette décision est le fruit d’un plaidoyer intense de la délégation congolaise lors d’un événement parallèle à la session. Le ministre a précisé que la présentation d’images authentiques, de témoignages et d’études documentées menées par des organismes de droits humains a permis d’établir de manière indiscutable la réalité des crimes commis sur plusieurs décennies.

La seconde résolution, adoptée par la CADHP elle-même, s’appuie explicitement sur le rapport Mapping du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, publié en 2010, qui documente les violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003. Le rapport met en évidence des actes de génocide, une préméditation, une méthodologie organisée et des massacres systématiques, établissant un cadre solide pour la reconnaissance juridique des crimes sur le territoire congolais.

Ces résolutions s’inscrivent dans la continuité des précédentes initiatives de la CADHP et de l’ONU. La Commission a rappelé ses résolutions antérieures sur la RDC, notamment celles de 2008, 2010, 2013, 2014, 2019 et 2025, qui dénonçaient les violations graves et massives des droits de l’homme, les crimes internationaux et les violences sexuelles liées aux conflits. Elles prennent également en compte les rapports des Groupes Experts de l’ONU mandatés par le Conseil de sécurité entre 2004 et 2025, ainsi que les recommandations de la neuvième édition du Forum sur la Justice Transitionnelle, tenue en septembre 2025 à Kinshasa, en collaboration avec l’Union Africaine et le Gouvernement congolais.

Lire aussi : RDC : le Conseil Supérieur de la Magistrature conteste les « magistrats » recrutés par le M23

Cette reconnaissance repose également sur le cadre juridique africain, notamment la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, le Protocole de Maputo relatif aux droits des femmes, et les principes de justice transitionnelle de l’Union africaine, qui insistent sur le droit à la vérité, le droit à la justice, le droit à la réparation et la garantie de non-répétition.

La responsabilité de l’État congolais

La CADHP rappelle au Gouvernement de la RDC sa responsabilité de garantir la sécurité sur l’ensemble du territoire, de protéger ses populations et de mettre en place des enquêtes et procédures judiciaires pertinentes pour juger ces crimes. La Commission exhorte également le pays à collaborer avec l’Union africaine et d’autres partenaires pour rendre justice aux victimes, notamment en utilisant la justice transitionnelle comme mécanisme central de réparation et de réconciliation.

Pour le ministre Samuel Mbemba Kabuya, ces deux résolutions marquent une victoire diplomatique et juridique majeure. « Les premiers résultats commencent à tomber. La société civile africaine a reconnu le génocide commis chez nous, et la Commission africaine a fait de même », a-t-il souligné.

Ces documents symboliques seront remis officiellement au Président de la République lors d’une cérémonie de restitution prévue dans les prochains jours, représentant une avancée historique dans la quête de justice et de reconnaissance des victimes des crimes internationaux en RDC.

Joseph Aciza

Share.
Leave A Reply

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.