Intervenons-nous

La Société Civile du Sud-Kivu dénonce l’existence «effective» d’un pillage systématique des ressources naturelles dans d’exploitation artisanale des minerais au Sud-Kivu, notamment celle décriée en territoire de Mwenga. Selon elle, cette exploitation «illicite» contribue à la clochardisation et à la paupérisation des communautés, au lieu de contribuer à leur développement.

Lors d’un point de presse du groupe thématique Mines de la Société Civile, tenu ce lundi 6 septembre 2021 à Bukavu, cette structure a déploré le laxisme du Ministère national des mines, ainsi que de l’administration des mines en province, dans l’application des dispositions pertinentes du code minier congolais : un laxisme qui selon elle, frise la complicité dans cette exploitation illicite des minerais à l’Est du pays, notamment par des sujets chinois, aussi bien dans le territoire de Mwenga que dans d’autres provinces du pays.

«Réunies au Bureau de Coordination de la Société Civile du Sud-Kivu ce vendredi 03 Septembre 2021 pour analyser le contexte général y afférent, les organisations de la Société Civile ont noté l’installation d’un affairisme savamment institué au profit de certaines personnalités politiques et militaires hautement placées au détriment de l’Etat et des communautés locales. Le risque de la détérioration du climat sécuritaire et d’implosion sociocommunautaire consécutives aux suspicions entre les populations et les autorités coutumières locales. La soustraction par les entreprises de leurs responsabilités environnementales et sociétales sous le couvert de l’exploitation minière artisanale à travers les coopératives minières contrôlées par des élites sociales, politiques et militaires. La persistance du sous-développement suite au pillage des ressources minières du pays par les étrangers,» déclare Adrien Zawadi, Président du Bureau de Coordination de la Société Civile.

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Selon la Société Civile, l’exploitation qui s’opère à Mwenga se caractérise actuellement par l’exploitation Semi Industrielle dans les zones non érigées en zones d’exploitation artisanale; la présence des sujets étrangers en séjour irrégulier sur le territoire national; l’absence d’un agrément octroyant un permis de recherche ni d’exploitation.

Mais aussi l’absence des statistiques de production et de traçabilité des minerais produits; la destruction de la biodiversité, des écosystèmes et des cultures ainsi que la pollution des rivières et des cours d’eaux; les menaces, les arrestations arbitraires, et les coups et blessures volontaires; la violation des propriétés privées et le trouble de jouissance, et des menaces, arrestations arbitraires, ainsi que des coups et blessures volontaires contre des populations locales.

La Société Civile du Sud-Kivu dit soutenir la mesure portant suspension des activités de six entreprises minières et leurs partenaires, intervenant dans le territoire de Mwenga jusqu’à nouvel ordre par le Gouverneur de province. Elles encouragent tout de même les enquêtes proposées par la Ministre nationale des mines, en vue d’établir toutes les responsabilités en rapport avec ce dossier.

Face à cette situation, la Société Civile du Sud-Kivu recommande :

Au Président de la République

-Veiller au respect par le gouvernement de I ‘instruction donnée aux ministres sectoriels en conseil des ministres sur I ‘exploitation illicite des minerais au pays.

Au Parlement

-Activer les mécanismes constitutionnels de contrôle parlementaire à l’endroit des ministères sectoriels en charge de respect des lois de la République en matières des ressources naturelles, protection de I ‘environnement, justice et droits humains,

Au Vice-Premier Ministre et Ministre de l’intérieur

-Réserver une fin de non-recevoir à la lettre de Madame le ministre national des mines,

-Ordonner la révocation des visas et titres de séjour ainsi que l’expulsion du territoire national de tous les sujets chinois impliqués dans l’exploitation illicite des minerais et les violations des droits de l’homme.

Au Ministère national de la défense et au Commandement des forces armées

-Initier et Prendre les sanctions selon le cas à l’endroit de tous les militaires quel que soit leur grade qui se seraient impliqués dans l’exploitation illicite des minerais et la violation des droits humains.

-Déferrer devant les juridictions militaires tout homme en uniforme quel que soit son rang qui se serait rendu coupable de violation des droits humains.

-Accélérer le processus de la réforme du secteur de la défense et sécurité en veillant au casernement de toutes les unités des forces armées.

Au Ministère national des mines

-Rendre public dans un délai raisonnable, les résultats des enquêtes en cours.

-Veiller scrupuleusement sur le respect des lois régissant le secteur minier.

-Annuler l’arrêté n 00285/CAB.MIN/MINES/01/2010 portant occupation des zones d’exploitation artisanale par les coopératives minières.

-Prendre des sanctions qui s ‘imposent à I ‘endroit des agents et fonctionnaires du secteur responsables de tel ou tel autre fait coupable.

-Retirer tous les agréments des coopératives non-conformes.

A l’Ambassade de la République Populaire de Chine

 -S’impliquer dans le rapatriement des sujets chinois en séjour irrégulier en République Démocratique du Congo.

Au Gouverneur de Province du Sud-Kivu

-Prendre sans tarder les mesures conservatoires à l’endroit de tous ses collaborateurs et autres membres de l’administration provinciale accusés de complicité et/ou de conflits d’intérêts dans l’exploitation illicite des minerais.

-Assurer personnellement le suivi de l’application sans faille de sa mesure portant suspension des activités de six entreprises minières et leurs coopératives partenaires dans le territoire de Mwenga.

-Rendre public les rapports de la commission ad hoc de la mission diligentée à Mwenga sur l’exploitation illicite des minerais.

Contexte :

Depuis un temps, plusieurs structures locales n’ont cessé de dénoncer l’exploitation jugée illicite des minerais par des sociétés chinoises en territoire de Mwenga, qui détruisent l’environnement à travers notamment la pollution des rivières, selon des organisations locales, qui ajoutent que ces derniers ravagent également des champs et des étangs piscicoles des habitants sans aucune indemnisation.

Certaines sociétés chinoises refuseraient même de signer des cahiers des charges avec la population locale comme l’exige le nouveau Code minier congolais, alors que certaines autres qui signent ces engagements, tardent à initier les projets de développement convenus.

Une délégation parlementaire composée de 8 députés provinciaux, a même confirmé le week-end dernier l’exploitation « illicite » des minerais par des sociétés chinoises, dans la chefferie des Wamuzimu, en territoire de Mwenga.

Après plusieurs alertes et dénonciations de différentes couches socio-politiques, le Gouverneur du Sud-Kivu, Théo Ngwabidje, avait signé vendredi 20 août dernier, un arrêté qui suspendait les activités de 6 sociétés minières chinoises avec leurs coopératives, dans cette partie de la province.

Mais dans une correspondance adressée au Vice-Premier Ministre de l’intérieur, quelques jours après cette décision du Gouverneur du Sud-Kivu, la Ministre nationale des Mines, Antoinette N’Samba, a relevé « l’incompétence » du Gouverneur de suspendre ces sociétés minières. Une compétence, selon elle, lui réservée exclusivement par la législation minière en vigueur.

La ministre Antoinette N’samba a même demandé au Ministre de l’Intérieur d’instruire le Gouverneur de rapporter sa décision pour permettre à ses inspecteurs de faire leur travail, et lui faire le rapport, pour des dispositions « utiles » sur l’exploitation illégale décriée.

Cette délégation d’inspecteurs venue de Kinshasa a effectivement clôturé samedi 4 septembre 2021 sa mission de 3 jours, après avoir visité différents sites miniers et auditionné certains responsables de ces sociétés chinoises.

Ces derniers ont déclaré après leur inspection, que des militaires sont encore présents dans les sites miniers, les rivières Zalya et Elila sont polluées suite à l’utilisation du mercure, et à cela s’ajoute la destruction des champs des populations et des forêts. En conclusion, a dit ladite délégation, la nature, l’environnement et les écosystèmes semblent être menacés par cette exploitation.

Une décision de la Ministre de tutelle est donc attendue, car même en Conseil des Ministres vendredi 3 septembre dernier, le Premier Ministre Sama Lukonde a demandé aux Ministres en charge de l’Intérieur, de la Justice et des Mines, de sévir contre les auteurs de cette situation qui, selon lui, est aussi facilitée par la présence des groupes armés qui empêchent le contrôle de l’État.

Museza Cikuru

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