Alors que le reste du monde célébrait la Journée Mondiale de la Bière dans la joie, la ville de Bukavu, au Sud-Kivu (RDC), l’a vécue avec amertume. La fermeture de la Bralima, productrice de la célèbre bière « Primus », a plongé la ville dans une crise économique et sociale inédite.
La société, victime de pillages attribués à l’insécurité liée à la présence du mouvement armé M23-AFC dans le Sud-Kivu, a suspendu ses activités locales. Depuis l’arrêt de la production, bars, buvettes, hôtels et consommateurs déplorent la disparition de leur produit phare.
« C’est comme si on nous avait coupé l’oxygène. Les clients veulent la Primus. Les autres marques ne font pas recette ici », témoigne Lucien, propriétaire d’un Nganda à Bukavu. La pénurie affecte lourdement les revenus des tenanciers, tandis que les bières importées du Rwanda, du Burundi, de l’Ouganda ou venues de Butembo, Beni et Lubumbashi peinent à convaincre — en raison de leur coût élevé et de leur goût différent.
Au-delà des pertes économiques, c’est un pan de l’identité urbaine de Bukavu qui vacille. La Primus ne représentait pas qu’une bière : elle incarnait une tradition, un lien social, une ambiance particulière dans les bars, les cérémonies ou les retrouvailles entre amis.
« La Primus, c’était plus qu’une bière. Aujourd’hui, on boit sans plaisir », regrette Chance Ahadi, rencontré à la place Major Vangu.
La Journée Mondiale de la Bière, censée célébrer la richesse brassicole, a ainsi été vécue à Bukavu comme le triste symbole des effets collatéraux de l’instabilité dans l’Est du pays. Nombreux sont ceux qui espèrent une relance rapide des activités de la Bralima et une meilleure protection des infrastructures industrielles face aux crises sécuritaires.
Abdallah Mapenzi