Les enquêtes menées par le Groupe d’experts ont révélé que les Twirwaneho continuaient à financer leurs opérations par un modèle combinant impôt local et financement par la diaspora. Mahoro Peace Association, Impôt local, diaspora…voici comment les opérations de meurtre, pillage, attaques contre des civils par des Twirwaneho sont financées.
Soutenir les Twirwaneho, responsables de meurtres, de recrutement d’enfants et d’attaques contre le personnel des Nations Unies constitue pourtant une violation du régime de sanctions de l’ONU.
Impôt local
Selon les experts de l’ONU, le groupe Twirwaneho est financé en premier lieu par un impôt qu’il prélève sur les membres de la communauté Banyamulenge vivant dans les zones qu’il contrôle.
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D’autres personnes n’appartenant pas à la communauté Banyamulenge ont également été contraintes de payer par crainte de représailles.
« Les investigations menées par le Groupe d’experts ont révélé un système d’imposition mensuelle ; par exemple, les policiers, les commerçants et les conducteurs de motos devaient payer 10 dollars chacun, tandis que les enseignants payaient 10.000 francs congolais. Un enseignant basé dans le groupement de Bijombo a déclaré que ses collègues et lui devaient payer ce montant à des agents spéciaux appartenant à un comité des Twirwaneho. Des sources basées à Minembwe et des sources proches des Twirwaneho ont également informé le Groupe d’experts que des institutions financières locales participaient à ce système d’imposition. Par exemple, deux enseignants qui recevaient leur salaire par l’intermédiaire de banques locales ont déclaré que l’impôt était déduit directement par leur banque », affirme le groupe d’Experts.
Un commandant des Twirwaneho, Charles Gikwerere, cité dans le rapport des Experts de l’ONU a été cité comme étant au centre du financement local des Twirwaneho, gérant, dans le commandement du groupe, tout l’argent issu de ces impôts illégaux.
Appui essentiel de la diaspora
Outre les impôts locaux prélevés dans les zones contrôlées par les Twirwaneho, l’appui financier de la diaspora a été important, selon le Groupe d’Experts.
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Des sources de la communauté Banyamulenge en République démocratique du Congo et à l’étranger, d’anciens membres des Twirwaneho, des chercheurs, d’autres membres de groupes armés opérant sur le territoire de Fizi et des services de sécurité ont confirmé que les principales sources de financement des Twirwaneho provenaient de la diaspora Banyamulenge dans la région et aux États-Unis.
Plusieurs combattants ayant quitté le groupe armé en mars 2023 ont déclaré au Groupe d’experts que leurs supérieurs avaient souvent fait allusion à ce financement, leur conseillant de travailler dur « afin de faire honneur » à l’argent fourni par la diaspora.
« Le Groupe d’experts a établi que des dirigeants de la diaspora basée aux États-Unis ont publiquement exhorté les membres de la communauté à apporter un soutien financier aux Twirwaneho. Par exemple, lors d’une cérémonie commémorative aux États-Unis en l’honneur d’un commandant des Twirwaneho décédé, Bonheur Sekunzi Muragwa, trois responsables locaux liés à la Mahoro Peace Association ont exprimé leur soutien aux Twirwaneho ; l’un d’entre eux a demandé au public d’augmenter sa cotisation mensuelle de 20 dollars afin de soutenir des personnes comme Bonheur, qui « partent au combat pieds nus et affamées ». Un autre responsable local a menacé ceux qui ne contribuaient pas d’être exclus de la communauté », note le Groupe d’Experts.
Mahoro Peace Association et plus d’un million d’Euros dans la région
La Mahoro Peace Association, fondée par des Banyamulenge aux États-Unis, est l’une des plus grandes associations communautaires Banyamulenge au monde.
Plusieurs responsables locaux ont quitté la Mahoro Peace Association pour créer une autre association appelée « Banyamulenge Mutuality-Unity ».
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« Ils ont informé le Groupe d’experts que leur décision avait été motivée par le fait que les dirigeants de la Mahoro Peace Association ne soutenaient que les Twirwaneho et non les Gumino. Ils se sont également opposés au rapprochement entre les Twirwaneho, la Mahoro Peace Association et le Rwanda. Plusieurs sources ont expliqué que les contributions de la diaspora, notamment de la Mahoro Peace Association, ont commencé quand les Twirwaneho étaient encore un groupe d’autodéfense mais que les cotisations ont augmenté sous le commandement de Makanika ».
Selon ces sources, plus les combattants faisaient de conquêtes militaires, plus ils recevaient de fonds.
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La Mahoro Peace Association n’a pas donné au Groupe d’experts toutes les informations sur les transferts d’argent effectués vers la République démocratique du Congo et la région, mais a confirmé qu’elle avait dépensé 384.286 dollars pour l’aide humanitaire en 2022.
Sur la base de ce montant et d’informations supplémentaires obtenues au cours de ses enquêtes, le Groupe d’experts a estimé que la Mahoro Peace Association avait acheminé plus d’un million de dollars dans la région depuis 2020.
« La Mahoro Peace Association a déclaré au Groupe d’experts que les fonds qu’elle envoyait dans la région étaient exclusivement destinés à répondre à des besoins humanitaires par l’intermédiaire de membres de la communauté Banyamulenge au Burundi, au Kenya, en République démocratique du Congo et au Rwanda ».
Pourtant, le Groupe d’experts a reçu des preuves que certains de ces membres étaient liés aux Twirwaneho, et plusieurs sources ont indiqué que certains fonds ont été détournés au profit des Twirwaneho.