Intervenons-nous

La situation sécuritaire, humanitaire et socio-économique à l’Est de la République Démocratique du Congo continue de se détériorer, s’approchant d’une situation catastrophique, alerte le Baromètre Citoyen de la Paix, la Sécurité et les Droits de l’Homme, Numéro 08, publié en octobre 2025 par la Coalition Pamoja kwa Amani (C-PKA).

Les affrontements entre les Forces Armées de la RDC (FARDC), leurs alliés « wazalendo » et les rebelles de l’AFC-M23, soutenus par le Rwanda, se multiplient sur toutes les lignes de front. Depuis plusieurs semaines, les FARDC utilisent régulièrement drones CH-4 et avions Sukhoi pour bombarder les positions rebelles, tandis que la population civile paie le prix fort : dizaines de milliers de personnes fuient quotidiennement leurs villages, se retrouvant exposées aux intempéries, sans assistance humanitaire.

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Selon le C-PKA, ces conflits sont également motivés par le contrôle des ressources naturelles, notamment les minerais, afin de financer la guerre. Le site minier de Lomera à Luhihi, dans le territoire de Kabare (Sud-Kivu), en est un exemple dramatique. Depuis le 30 août 2025, l’AFC-M23 a fermé le site, obligeant plus de 30 000 creuseurs artisanaux, commerçants et habitants à quitter la zone sous contrainte armée. Conséquence : des familles démunies, des économies locales détruites et une montée de l’insécurité, avec des exécutions sommaires et enrôlements forcés de jeunes dans les rangs rebelles.

Les femmes, qui exploitaient de petites activités commerciales sur le site, sont particulièrement touchées. Certaines avaient contracté des dettes pour ouvrir restaurants et bistrots afin de subvenir aux besoins de leur famille. La population locale dénonce une exploitation des minerais à des fins personnelles par les responsables de l’AFC-M23 et déplore que ces actions aggravent la misère et la précarité déjà présentes dans la région.

Parallèlement, les négociations de paix internationales peinent à progresser. Alors que Doha (Qatar) et Washington ont signé des mécanismes de suivi du cessez-le-feu, sur le terrain, la guerre est totale. Le C-PKA dénombre 27 violations flagrantes du cessez-le-feu rien que pendant les deux dernières semaines d’octobre, notamment dans les territoires de Walikale, Masisi, Lubero, Walungu et Kabare. Des bombardements ont également visé l’usine d’or de Twangiza (Mwenga) depuis le 13 octobre, avec l’utilisation de drones et d’avions de chasse par les FARDC, détruisant infrastructures et réserves stratégiques.

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Le rapport du C-PKA détaille un bilan humain alarmant : au Sud-Kivu, 95 personnes ont été tuées et 60 corps sans vie retrouvés en octobre 2025. Le territoire de Kabare enregistre le plus grand nombre de victimes avec 34 cas, suivi de Bukavu et Fizi. Les affrontements récurrents impliquant les rebelles et les groupes « wazalendo » entraînent tortures, arrestations arbitraires, violences sexuelles, exécutions sommaires et enrôlements forcés d’enfants, selon le C-PKA.

Le phénomène des « wazalendo », groupes armés locaux autoproclamés, constitue une menace supplémentaire pour la paix et la sécurité. Selon le C-PKA, il existerait plus de 65 généraux autoproclamés parmi ces factions, et de nombreux enfants y sont recrutés, en violation flagrante des normes internationales.

Face à cette crise, le Baromètre citoyen lance un appel pressant au Président des États-Unis, Donald Trump, pour qu’il prenne des mesures contraignantes afin de contraindre les belligérants au respect des accords de paix et au cessez-le-feu. La Coalition souligne que sans pression internationale, les processus de négociation risquent de rester inefficaces.

Le rapport signale également la « balkanisation » progressive des zones sous contrôle de l’AFC-M23, avec la mise en place de visas obligatoires pour tout étranger et la nomination d’autorités administratives locales. Le mouvement continue de financer sa guerre par l’exploitation illégale des minerais et le contrôle des postes frontaliers.

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Enfin, le C-PKA rappelle que la protection des patrimoines naturels comme le Parc National de Kahuzi Biega (Sud-Kivu) et le Parc National de Virunga (Nord-Kivu) est menacée par la présence de groupes armés, qui exploitent illégalement les ressources et chassent les animaux protégés.

Dans ce contexte dramatique, le C-PKA recommande notamment la reprise des activités minières de Lomera, le renforcement de la sécurité sur le site et un contrôle international des chaînes d’approvisionnement des minerais. Le Baromètre citoyen souligne que justice et inclusion des communautés locales sont des conditions indispensables pour la paix à l’Est de la RDC.

Jean-Luc M.

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